Ça tourne à Séoul : tournage en plein délire

Difficile de savoir à quoi s’attendre quand on découvre un nouveau film de Kim Jee-woon. Le réalisateur coréen, adepte de la violence baroque, aime toucher à tous les genres. Ça tourne à Séoul (quel horrible titre français…) confirme ces envies de bougeotte en nous plongeant dans le tournage loufoque d’un film d’horreur dans les années 70.

Kim, le personnage principal interprété par l’incontournable Song Kang-ho, est un réalisateur médiocre qui a connu le succès avec son premier film, et qui depuis enchaîne les croûtes. Il vient de finir de tourner son dernier long-métrage auquel personne ne croit vraiment. C’est alors qu’il est pris d’une épiphanie : en changeant la fin, il peut créer un chef d’œuvre. Il lui faut alors retourner les dernières scènes de son film, de façon incognito pour échapper à la censure et enfin prouver au monde qu’il est à la hauteur des promesses de son premier film.

Vous voyez donc venir l’idée : Ça tourne à Séoul est une mise en abîme qui suit le tournage sur une journée de scènes-clés d’un film fictif. Un tournage qui multiplie évidemment les galères à un rythme échevelé. La force du film tient dans cette fuite en avant permanente qui emporte dans son grand tourbillon l’esprit critique du spectateur. On s’amuse souvent devant Ça tourne à Séoul, qui retrouve régulièrement l’esprit du film japonais Ne coupez pas ! (remaké récemment par Hazanavicius). Kim Jee-woon s’amuse à dépeindre la folie mégalo d’un réalisateur prêt à tout sacrifier sur l’autel du chef d’œuvre sans oublier d’égratigner l’ensemble de l’équipe de tournage, des producteurs anxieux aux acteurs et actrices insupportables. Le film réussit à créer une sympathique ambiance de douce folie qui s’inscrit dans la lignée des retranscriptions de tournages foutraques au cinéma (de Ça tourne à Manhattan (ah oui ok, j’ai compris pour le titre) à Babylon).

« Ça va couper, chérie »

Malheureusement, le film n’arrive jamais totalement à se sortir de l’exercice de style. La tentative arachnéenne de tisser une autre dimension au récit est intéressante mais tombe comme un cheveu sur la soupe. Le récit est trop encombré par son dispositif et par son avalanche d’idées pour toucher quelque chose de réel et on finit par être gêné par l’artificialité de tout ce qui est montré. Là où Ne coupez pas avait pour lui la fraîcheur de cette proposition fauchée et surprenante, Ça tourne à Séoul (non mais quand même, malgré tout, ça va pas ce titre…) laisse plutôt l’impression d’un film de petit malin qui se perd dans ses propres pièges.

Restent néanmoins le plaisir et l’énergie communicative d’un film au rythme enlevé qui sait créer une complicité attachante avec son spectateur. Cela peut suffire pour se laisser prendre dans la toile de Kim Jee-woon.

Ça va couper à Séoul, de Kim Jee-woon avec Song Kang-ho et Im Soo-jeong, sortie le 8 novembre 2023

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