Cannes 2025. Le bilan !

Pour respecter la tradition, Cinématraque met un point final à sa couverture du Festival de Cannes par un article bilan, quelques jours après la fin de cette intense parenthèse cinéphile.

Nombre de films vus

Julien : 35, si mes comptes sont bons

Mehdi : 33, si j’ai bien compté

Podium (toutes catégories confondues)

Julien : L’Agent secret (Kléber Mendonça Filho) / Un Simple accident (Jafar Panahi) / Valeur sentimentale (Joachim Trier)

Mehdi : Magellan (Lav Diaz)/ Resurrection (Bi Gan)/ Un simple accident (Jafar Panahi)

Plan le plus marquant (toutes catégories confondues)

Julien : Le plan final d’Un simple accident, glaçant et à double tranchant, plutôt pessimiste de la part de Jafar Panahi quant à son futur retour en Iran après sa Palme.

Mehdi : C’est peut-être un peu la triche mais je choisis le long plan-séquence de Resurrection. C’est un tour de force d’une richesse folle, un plan qui se réinvente en permanence et qui se conclut de la plus parfaite des manières.

Meilleurs actrice et acteur (toutes catégories confondues)

Julien : Théodore Pellerin pour Nino (Semaine de la Critique) / Parinaz Izadyar pour Woman and Child (Compétition officielle)

Mehdi : Wagner Moura pour L’agent secret / Nadia Melliti pour La petite dernière (oui, comme le jury et alors ?)

Film que tu regrettes le plus avoir raté (toutes catégories confondues)

Julien : Yes de Nadav Lapid (Quinzaine) et Pillion de Harry Lighton (Un Certain Regard)

Mehdi : Le Mystérieux Regard du flamant rose de Diégo Cespedes (Un Certain Regard)

Ton avis sur le palmarès et cette édition dans son ensemble

Julien : Difficile de reprocher quoi que ce soit au palmarès du jury de Juliette Binoche, qui a su à mon avis identifier les films les plus marquants de cette cuvée 2025 riche en bons films mais chiche en grands films. On pourra ergoter sur le bien-fondé de la place des Dardenne, qui fait un peu tâche dans le palmarès, et sur la place de certains films (Sirat un peu trop bas?). Un peu déçu dans un premier temps de voir le magnifique Agent secret de Kléber Mendonça Filho « seulement » récompensé pour la performance de Wagner Moura, je trouve au final que ce double prix rend justice au film tout en permettant de mettre en avant une proposition très différente (plus classique sans doute) avec le Grand Prix pour Valeur sentimentale. La Palme de Jafar Panahi, qui semblait une évidence, rattrape un peu le raté du palmarès de l’an dernier et ce prix spécial mou de genou pour Les Graines du figuier sauvage de Mohammad Rasoulof (que je trouve probablement encore meilleur qu’Un simple accident). Et pour conclure sur les prix spéciaux, celui présenté à Bi Gan pour son Résurrection est je trouve, une fois n’est pas coutume, l’exemple d’un prix spécial particulièrement bien pensé. Si en temps normal j’exècre ces prix factices qui ne signifient pas grand chose, ici je trouve qu’il capte parfaitement la bizarrerie de Résurrection, un objet filmique si radical, inégal et clivant qui lui donner un accessit normal en deviendrait presque une insulte. Ce prix spécial valide son statut de candidat improbable et incomparable, semblable à nul autre, pour lequel il est difficile d’en récompenser les mérites par une récompense traditionnelle. En bref, mes respects à Juliette Binoche et ses camarades jurés.

Mehdi : Tout comme Julien, je trouve le palmarès très bon comme il est, mes films préférés y sont récompensés. Le niveau général de la sélection était satisfaisant même s’il manquait sûrement une ou deux œuvres marquantes pour en faire une édition remarquable.

Je retiens surtout de cette année la présence paradoxale de la souffrance des Gazaouis à Cannes. Au-delà de la très tiède cérémonie d’ouverture, trois moments ont essayé de dénoncer le génocide palestinien au milieu du vacarme cannois : la présentation du film Put your Hand on your Soul and Walk de la réalisatrice iranienne Sepideh Farsi, la présentation du film Once upon a time in Gaza des frères palestiniens Tarzan Nasser et Arab Nasser, la conférence de presse organisée par Sepideh Farsi la veille de la cérémonie de clôture avec des représentants de l’ONU et d’ONG et les interventions à distance de Ken Loach et Adèle Haenel. On peut ajouter la présentation du film Yes par le réalisateur israélien Nadav Lapid, étrangement écarté de la compétition officielle.

La Palestine était donc présente dans les esprits et dans les cœurs mais malgré tout, cela semblait encore bien peu par rapport à la réalité de ce qui se passe en ce moment là-bas. La conférence de presse réunissant une poignée de journalistes et de soutiens semblait surtout souligner le gouffre qui séparait la détresse de ceux qui appellent à agir pour la Palestine et l’insouciance festive de la célébration du cinéma. La bulle cannoise reste décidément hermétique aux cris de détresse de ceux qu’on opprime, bien à rebours des grands discours péremptoires sur les vertus humanistes du cinéma dont on nous aura abreuvés tout au long de la quinzaine.

Une anecdote que tu retiens ?

Julien : Le terme d’anecdote est sans doute trop faible pour évoquer ce moment, mais la séance de questions-réponses ayant suivi la présentation de Put your Hand on your Soul and Walk de Sepideh Farsi, documentaire mettant en scène la regrettée Fatma Hassona, morte sous les bombes d’Israël quelques heures après la sélection du film à Cannes, était un moment incontournable de ce Festival, justement tancé pour sa réaction trop timorée à cet énième drame surgi du génocide actuel en cours à Gaza. La présence dans la salle de spectateurs d’origine gazaouie n’en a qu’ajouté davantage à l’émotion présente dans la salle ce soir-là. Elle rend la diffusion du film d’autant plus importante dans le contexte actuel, où les consciences de certains s’ouvrent enfin (tardivement certes, mais quand même), vis-à-vis de l’atrocité des crimes commis par le régime de Benjamin Netanyahu.

Mehdi : Bon Julien, c’était censé être le moment cocasse de l’article bilan là… Comment j’embraye moi ? Bon, pour conclure, je vais évoquer la panne de courant généralisé qui a frappé Cannes le dernier jour du Festival. Apparemment causée par une attaque visant le festival (qui avait son propre système d’alimentation bien en place), la panne a surtout surpris les habitants qui ont eu un petit aperçu d’un black-out grand ampleur. Touristes affamés à la recherche d’argent liquide, agents de gare criant au mégaphone les arrivées des trains, on se serait cru dans les premières scènes d’un film catastrophe donnant une dernière saveur assez étrange à ce Cannes 2025.

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