Comment devenir riche (grâce à sa grand-mère) : mamie blues

Quand on parle de productions thaïlandaises chez Cinématraque, il y a Mehdi (pas que lui quand même ! ndlr) qui idolâtre Apichatpong Weerasethakul, et moi qui bassine le monde entier avec mes séries boys love (un gros phénomène en Thaïlande, avec un écho dans le monde entier mais qui reste un public « de niche »).

Peu de ces productions parviennent à se faire une place à l’international : le film Comment devenir riche (grâce à sa grand-mère), en fait partie ! Deuxième plus gros succès du box-office thaïlandais l’an passé, le film de Pat Boonitipat est aussi le premier long métrage thaïlandais à avoir atteint les quinze shortlistés pour l’Oscar du meilleur film étranger. S’il n’a pas été retenu parmi les cinq derniers concurrents, cela ne l’a pas empêché de devenir un succès dans d’autres pays comme l’Australie ou les Pays-Bas (où il a fait mieux qu’Emilia Perez, il y a une forme de justice en ce monde).

Et en tant que gros fada de BL, j’attendais de voir ce film pour une raison très simple : Billkin (Putthipong Assaratanakul), l’interprète de M, qui cherche à se rapprocher en douce de sa mamie malade en espérant récupérer son flouze (au cas où vous n’aviez pas encore compris l’objet du truc malgré le titre). À vingt-cinq ans, Billkin est déjà une star : acteur, chanteur, influenceur avec des millions d’abonnés et égérie de grandes marques, il est le parfait exemple du star system thaïlandais dont les membres s’illustrent par leur extrême polyvalence. C’est aussi dans son pairing avec PP Krit qu’il affole les fans, depuis qu’ils ont joué ensemble dans les séries My Ambulance et I Told Sunset About You (je ne dirai jamais assez à quel point cette dernière est fantastique). Et pourtant, Comment devenir riche n’est que son premier grand rôle au cinéma. C’est le distributeur Tandem qui propose ce film dans les salles françaises, je m’adresse d’ailleurs ici directement à eux : si jamais vous pouviez en profiter pour sortir The Paradise of Thorns de Boss Kuno (réalisateur de la fameuse série I Told Sunset About You avec Billkin, et de Gelboys dont je vous parlais en coup de cœur de mars), ce serait vraiment sympa aussi (sivouplé).

Comment devenir riche (grâce à sa grand-mère) tient compte d’une situation universelle : l’attention (ou inattention) accordée aux personnes âgées de nos familles et tout ce qui peut en découler. D’abord on se demande qui va vouloir s’occuper de mamie, à moins de la placer en foyer, puis on s’écharpe à l’avance en pensant égoïstement à la succession. C’est le cas de M, l’un des jeunes petits-fils, qui voit une occasion en or se profiler lorsqu’il apprend que sa grand-mère Mengju (Usha « Taew » Seamkhum) a un cancer avancé. Il apparaît alors comme un personnage égoïste et profiteur, qui aurait préféré faire carrière en faisant du streaming. Toute la famille de M s’interroge : faut-il dire la vérité à leur « amah » sur son état de santé ? Ce qui importe le plus n’étant pas vraiment ceci, mais tout simplement l’argent qu’elle détient. M, mais aussi tous les membres de sa famille, ont tous un rapport particulier avec l’argent. Tous en ont besoin, d’une façon ou d’une autre.

Tout ne devient alors que représentation : le comportement de M pour s’accorder les faveurs de sa grand-mère, toutes les réunions familiales où toute la famille cohabite dans un même espace sans pour autant parvenir à être véritablement ensemble… La sincérité est au cœur du film de Pat Boonitipat, ainsi que la reconnaissance envers nos ainés pour tout ce qu’ils ont pu faire pour nous. Un écho qui se fait entendre à travers le monde alors même que les personnages du film sont profondément ancrés dans les valeurs et l’histoire de la société thaïlandaise, et plus précisément ici sino-thaïlandaise. Les valeurs diffèrent d’une génération à l’autre : Mengju tient à poursuivre les moments de célébration et de culte (comme le Jour des Morts) que les jeunes voient plutôt comme une contrainte. Les relations familiales se construisent davantage avec les fils qu’avec les filles, comme il est d’usage dans la communauté sino-thaïlandaise. Cet ancrage socio-culturel prononcé n’empêche pas Comment devenir riche d’atteindre l’universalité, qui tient aussi énormément à la justesse de l’interprétation de Taew et Billkin, dont les personnages se découvrent mutuellement au moment où ils s’y attendaient le moins. On adhèrera peut-être moins à une fin peut-être un peu trop tire-larmes si on est pas fan de mélo comme mon voisin de salle en projection presse (moi j’ai chialé comme une madeleine, mais je ne l’ai pas encore montré sur TikTok).

Comment devenir riche (grâce à sa grand-mère), un film de Pat Boonnitipat. Avec Putthipong « Billkin » Assaratanakul et Usha « Taew » Seamkhum. En salles le 16 avril 2025.

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