Jurassic World le monde d’après : Navetosoraurus

C’est l’histoire d’un type qui décide de déterrer une immense relique, dont la mythologie est connu de tous, pour lui redonner vie… Et qui en fait une horreur infâme. Ce type c’est Colin Trevorrow, et la relique, c’est Jurassic Park. Non pas que Steven Spielberg n’ait pas déjà entaché son œuvre en proposant un deuxième volet largement dispensable – au delà de quelques séquences sympathiques – et un troisième insignifiant mais correct, mais il faut avouer que Trevorrow ressemble pas mal au moustique fossilisé du premier film : minuscule, ridicule, mais capable de faire naître quelque chose de monstrueux.

À la fin du deuxième volet de Jurassic World, scénarisé par Trevorrow et réalisé par Juan A. Bayona, les dinosaures s’étaient définitivement échappés des différents parcs et îles où ils étaient confinés, débarquant dans le monde des humains avec fracas et sublime. Le « world » du titre finissait alors par prendre tout son sens, comme si soudain la planète entière se retrouvait à voyager dans le temps, plongée dans le passé bien connu des chrétiens fondamentalistes où les hommes et les dinosaures cohabitaient tranquillement. Également, on avait toute une histoire sur une gamine clonée, ce qu’on appelle dans le jargon « jump the sharkosaurus ».

Pour clore sa trilogie en « beauté », le cinéaste décide donc d’inscrire sa saga dans l’ère du temps et d’accentuer la dimension « legacyquel » en associant les protagonistes du film d’origine (Alan Grant, Ellie Sattler et Ian Malcolm) aux nouveaux venus (le dompteur de vélociraptors, la championne de course en talons aiguilles, la petite clonée et Omar « Lupin » Sy). Double dose de dinosaures donc, pour un résultat… Catastrophique. Ne jouons pas sur les mots, ne faisons pas durer le suspense comme ce film de 2h30 qui ne raconte pas grand chose et annonçons la couleur : Jurassic World Dominion est un échec à tous les niveaux, comme les deux films précédents. Mais en pire.

La promesse de voir la réaction du monde entier à l’arrivée des dinosaures n’est pas tenue, tant le sujet est mis de côté en dehors de jolis plans à la National Geographic parsemés ici et là, et d’une séquence d’action potable à Malte (une course poursuite dans les rues avec des raptors mutants qui chassent une moto). L’introduction du film, d’une paresse à faire pâlir Gaston Lagaffe, utilise un reportage télé pour nous briefer sur où en est le monde. Certains protègent les dinosaures et créent des sortes de parcs protégés, tandis que d’autres font du braconnage. Enfin, un milliardaire ridicule totalement inspiré par Elon Musk (on le surnommera Elon Mouske) les rassemblent dans sa jungle et fait des recherches sur leurs propriétés génétiques pour guérir tout un tas de maladie, répétant les erreurs de John Hammond qui se prenait pour Dieu. Pour clarifier un peu, parce que ça paraît quand même important de s’attarder un des trucs les plus affligeants du film : Elan Mouske a créé des sauterelles géantes qui bouffent toutes les récoltes alimentaires du monde, sauf celles de sa compagnie. Elles deviennent incontrôlables, évidemment, ce qui veut dire qu’une large part de l’intrigue tourne autour de sauterelles géantes… Tu voulais voir Jurassic World Dominion, et en fait tu te retrouves devant un remake américain de La Nuée. On oublie facilement que l’original était adapté d’un roman de fiction à substrat professionnel qui comportait énormément de réflexions scientifiques, philosophiques et éthiques autour du pouvoir ultime : l’acte de création.

Mario et Yoshi

Très vite, l’action vient se confiner entre les murs du laboratoire d’Elan Mouske, pour rassembler tous nos personnages aux objectifs et intentions divergentes, et ainsi faire plaisir aux fans. Qu’on prend définitivement pour des cons, donc. Les nouveaux comme les anciens sont à peine écrits, rien n’est fait pour les rendre attachant au delà du souvenir que l’on peut en avoir des films précédents. Sauf pour Ian Malcolm, puisque Goldblum et les scénaristes ont décidé d’en faire une sortie de parodie de la figure publique de l’acteur, cabotinant dans tous les sens pour attirer l’attention et faire des blagues pourries qu’on croirait sorties d’un film Marvel basique.

Mais le pire dans tout ça n’est pas l’histoire abracadantesque et inintéressante au possible, ni la pauvreté de la mise en scène (on sauve une jolie séquence où Bryce Dallas Howard est obligée de plonger sous l’eau pour échapper à un énorme dino aux griffes plus longues que le nombre de bavures policières en France sous Macron), ni encore les vaines tentatives de tirer la corde sentimentale des fans en donnant le beau rôle à un T-Rex, ou en reproduisant la scène de mort d’un méchant du premier film à l’identique. Non, le pire, c’est qu’à aucun moment le film ne semble avoir la moindre idée de ce qu’est Jurassic Park. Car au moins le premier volet de la trilogie Trevorrow semblait avoir une conscience – étrange et cynique – de ne pouvoir être qu’une pâle imitation du Spielberg, mais ici il se perd en propositions confondantes de stupidité et de contradictions. En plaçant les dinosaures dans la position d’animaux victimes de braconnages, sans jamais étendre la réflexion aux autres animaux et à nos modes d’alimentation, par exemple.

Le plus frappant arrive pendant la grande séquence « dédiées » aux fans. L’intégralité du casting se retrouve réuni face au plus grand prédateur jamais connu (le Gigantosaurus, qui malgré son nom débile est un vrai dino pour le coup). Il s’agit d’abord de fuir, puis de refaire une scène du premier film pour Ian Malcolm en faisant diversion avec du feu, puis enfin de… défoncer sa race au dinosaure en lui cramant et poignardant la gueule. Sur cette victoire des humains face à la grosse bestiole, le thème majestueux de Jurassic Park se met alors à jouer en fanfare sur un plan d’ensemble de tous nos héros, semblant alors nous dire : voilà, c’est ça notre saga. Des héros humains qui lattent leur race à des dinos.

Cela n’a jamais été cela. Il serait temps de laisser les reliques du passé en paix. D’ailleurs, il aurait été plutôt sympa d’amener avec les dinosaures envahissant la terre une sorte de… Pandémie. Faisant écho ainsi à nos vies, et menant à l’extinction de notre espèce et laissant la planète aux créatures d’autrefois. Mais bon c’est moins vendeur…

Faudrait pas boire la tasse, là.

Jurassic World Le monde d’après, un film de Colin Trevorrow, avec Chris Prout, Bryce ton univers impitoyable Howard, Laura gay icon Dern, Sam Neill, Jeff Goldblum. Au cinéma le 08 juin 2022.

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1 thought on “Jurassic World le monde d’après : Navetosoraurus

  1. Moins une critique cinématographique qu’une blague un peu trop lourde pour faire rigoler les copains au PMU de la galerie marchande.

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