Jacob est capitaine d’un bateau vert et bl. Un jour, il décide de demander en mariage la première femme qui va entrer dans le bar qu’il occupe. Coup de bol, c’est Léa Seydoux qui passait par là. En même temps, étant donné qu’elle est partout dans ce Festival (sauf à Cannes), il fallait bien que ça tombe sur elle. De cette histoire d’amour et de haine, de jalousie et de rancœur, de disputes et de réconciliations, Ildiko Enyedi va tirer 170 interminables minutes qui en paraissent le double.
C’est fort dommage car le film s’ouvre sur plusieurs promesses. Les passages en bateau très réussis, s’alternent avec l’histoire d’amour débutante de manière rythmée. Les énigmatiques intertitres des six chapitres, donnent un ton moderne au film comme pour celui de Joachim Trier. On se prend à espérer être emporté dans un récit aussi élégant qu’épique sur les flots déchaînés. La sublime photographie amplifie cet espoir, on y est, devant l’un des grands films de ce festival de Cannes, on va pouvoir le crier sur tous les toits ! Hélas, dès la 20ème minute, nos sourires commencent à se figer alors que l’histoire commence à s’enliser à l’intérieur d’appartements irrespirables. Terminé la mer, terminé l’aventure. C’est parti pour plus de deux heures de lamentation d’un couple qui semble se complaire dans un malheur qu’ils se créent eux-même.
Le film est adapté d’un roman de l’écrivain hongrois Milan Füst. On ne peut pas dire que le film donne envie de se plonger dans l’œuvre d’origine dès la fin du générique. On essaye déjà de se réveiller et de comprendre pourquoi un tel calvaire nous a été infligé. Peut-être qu’avec une grosse heure de moins au compteur, l’intrigue aurait pu nous convaincre. Tout est centré sur une relation toxique entre les deux personnages, faite de non-dits, de coups de colère et de délitement progressif. Ils sont ensemble sans trop savoir pourquoi, et n’arrivent pas à se séparer pour les mêmes raisons. La vie de Jacob va donc devenir un enfer sentimental dans lequel il perdra ses repères et ce qui lui donnait goût à la vie. Pourquoi pas. Le film est en plus servi par une réalisation classique mais réussie, de très beaux décors d’époque et un sens du cadrage indéniable. Une scène de sexe à distance est ainsi l’occasion de se rappeler qu’il y a du talent derrière la caméra.
Mais pas assez pour espérer nous impliquer dans cette drôle de relation aussi longtemps. On finit par être aussi chagrin que Jacob et de prier les dieux de l’Amour et du Cinéma pour qu’ils se séparent enfin, qu’on puisse passer à autre chose. Le pauvre Louis Garrel coincé dans un rôle ridicule fait des apparitions de temps en temps mais difficile de croire qu’il peut être une raison suffisante pour faire vaciller un mariage. Au bout d’une heure de film, on ne croit plus en rien, ni aux personnages, ni à l’histoire, ni à l’amour, ni à la joie. L’ennui a tout emporté avec lui. En cela, L’Histoire de ma femme est involontairement le film le plus nihiliste du Festival.
On vous déconseille d’aller voir L’histoire de ma femme avec une montre au poignet car vous risquez de vous froissez un muscle à force de la regarder. Autant profiter de l’expérience jusqu’au bout en se noyant corps et âme dans cette histoire interminable quitte à croire une cinquantaine de fois que ça y est, c’est la fin là non ? Ou sinon, vous pouvez aussi ne pas le voir du tout.
L’histoire de ma femme d’Ildiko Enyedi, avec Léa Seydoux, Gijs Naber et Louis Garrel