Bilan de la Semaine de la Critique 2019

Depuis 1962, la Semaine de la Critique propose en parallèle de la sélection officielle, une sélection de long-métrages et de court-métrages. Petite particularité, ces films sont les premiers ou les deuxièmes de leur réalisateur, la Semaine de la Critique se voulant comme mission de faire découvrir des jeunes talents. 

Petit bilan donc des sept long-métrages de cette année, par ordre de préférence. Un trio de tête se détache fortement dans cette sélection très hétérogène. Si on apprécie la diversité des pays représentés, on peut regretter qu’une seule femme réalisatrice soit présente (le pire ratio de la croisette). Pour une sélection tournée vers l’avenir et les jeunes, c’est quand même un comble. Il va falloir corriger ça pour les années à venir…

  • A white white day, de Hlynur Palmason : Palmason confirme son talent dans ce deuxième film sur le deuil. La critique à lire ici. (Prix de l’interprétation)
  • J’ai perdu mon corps, Jérémy Clapin : Dans ce touchant film d’animation, on suit le parcours d’une main qui cherche à retrouver son propriétaire duquel elle a été brutalement arrachée lors d’un accident. Cette quête est surtout l’occasion par un montage parallèle de retracer la vie d’un adolescent timide qui a du mal à trouver sa place depuis la mort de ses parents. Servie par une animation de toute beauté, notamment dans la retranscription des mouvements de la main, J’ai perdu mon corps est une des belles surprises du festival. On se réjouit d’ailleurs, que le grand prix lui ait été attribué, car c’est toujours bon de rappeler que l’animation mérite d’être considérée à sa juste valeur (Grand prix).
  • Nuestras Madres, César Diaz : Film franco-belgo-guatémaltèque, ce qui n’arrive pas tous les quatre matins, Nuestras Madres, évoque les conséquences de la terrible guerre civile qui a ravagé le Guatemala. Ernesto, anthropologue aidant à l’identification des dépouilles, pense avoir retrouver la piste des ossements de son père, guérillero assassiné par la milice. Tendre, sobre et puissant Nuestras Madres, invoque les démons du pays sans jamais les filmer frontalement. Tous les personnages sont marqués dans leur chair par leur passé et tentent d’avancer sans oublier ce qu’ils ont vécu. Pour son premier long-métrage de fiction, après être passé par le documentaire, César Diaz livre un film poignant. Un réalisateur à suivre donc.
  • Abou Leïla, d’Amin Sidi-Boumédiène : Film algérien sur la quête hallucinée de deux amis, Abou Leïla est un film ambitieux mais qui tombe parfois dans la facilité. Critique ici
  • Cendre Noire, de Sofia Quiros Ubeda : La seule réalisatrice de la sélection propose avec ce film une jolie réflexion sur la mort à travers la relation entre une jeune fille et son grand-père. Malheureusement, le manque de souffle de Cendre Noire laisse trop la place à l’ennui dans un film pourtant assez court. La critique est à lire ici.
  • Le Miracle du Saint Inconnu, de Alaa Eddine Aljem. Ce film marocain part d’une idée amusante : un criminel avant de se faire rattraper par la police cache son butin au milieu du désert en simulant une tombe. A sa sortie de prison, il comprend que tout un village s’est construit autour de cette tombe venue nulle part et qu’un mausolée bien gardé a été construit autour de son précieux butin. Construit comme une petite fable, Le Miracle du Saint-Inconnu, n’a malheureusement pas assez de matière pour tenir sur la durée. Ce qui aurait été un formidable court ou moyen métrage, finit par lasser sur la longueur.  La sympathie que dégage l’ensemble des personnages ne suffira pas à graver ce film dans nos mémoires plus longtemps que quelques jours après le trajet retour.
  • Vivarium, de Lorcan Finnegan. Vivarium a des qualités : un bon casting, une jolie production, des idées de mise en scène par exemple. Mais c’est vraiment le genre de film rapidement insupportable. Partant d’une idée-concept, il déroule le fil de son intrigue qui se croit maline sans jamais apporter autre chose à l’idée de base. Le concept : un couple, bien sous tout rapport, se retrouve piégé dans un quartier résidentiel vide, qu’ils ne peuvent quitter et où ils devront élever un enfant qui n’est pas le leur. Vivarium est un film aussi vide que l’univers qu’il décrit. L’histoire étant moins bon qu’un épisode de La Quatrième Dimension et aussi mauvaise que la plupart des épisodes de Black Mirror, on se demande pourquoi en avoir fait un film. Dans une sélection souvent sobre et simple dans ses sujets, voir cette grande machine tourner à vide, est d’autant plus pénible. A réserver aux fans de Charlie Brooker.

En dehors de cette sélection, la Semaine a aussi proposé quelques films en séance spéciale :

  • Les héros ne meurent jamais, de Aude Léa Rapin. Étrange projet que ce film. Filmé comme un faux documentaire (la caméra est incluse dans le dispositif narratif, on voit parfois la perche dans les plans, le caméraman demande aux acteurs de se placer etc…), ce long-métrage suit un jeune homme à la recherche d’un Bosniaque dont il pense être la réincarnation. On est un peu perdu face à ce projet qui ne sait jamais trop se situer et semble un peu trop alambiqué dans son dispositif pour cerner efficacement le sujet si délicat qu’il veut traiter. On retiendra cependant la performance d’Adèle Haenel (encore elle) et une belle scène finale.
  • Dwelling in the Fuchun Mountains, de Gu Xiaogang. Premier volet d’un diptyque, cet ambitieux premier long-métrage chinois nous présente le temps d’une année, la vie compliquée de quatre frères avec leurs femmes et enfants. Obsédé par l’argent (volé, manquant, partagé ou rendu), le film touche par sa fluidité. Le scénario habilement construit permet aux saisons de glisser sur les personnages, les faisant évoluer sous nous yeux et façonnant de jolis moments dans les magnifiques paysages des montagnes chinoises. Un film très prometteur.

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