Litigante, c’est, en espagnol, la personne qui plaide sa cause. Et des causes, Sylvia en a beaucoup, entre un procès qui la guette à cause d’un marché public douteux, son enfant qui réclame son père qu’il n’a jamais connu, une nouvelle histoire d’amour et, surtout, le cancer de sa mère.
C’est donc un portrait de femme, comme le veut l’expression consacrée par les critiques qui ont besoin de formule toute faite pour rédiger leur article rapidement entre deux séances, que nous propose Franco Lolli pour son deuxième film. Son premier avait déjà été présenté à la semaine de la critique et n’avait pas convaincu notre envoyé spécial. Gardons un œil sur ses futurs projets, écrivait-on à l’époque. Et bien, on peut dire que ce projet-là réussit sa mission principale : donner vie au personnage de Sylvia qui porte le film.
Le choix de ne prendre qu’un seul acteur professionnel dans le film est payant tant les personnages semblent justes et sincères. Sylvia, confrontée à l’accumulation d’épreuves difficiles, est toujours à deux doigts de craquer mais ne perd jamais son énergie ni sa force. Sa relation avec sa mère est évidemment au cœur du film. Souvent conflictuelle (on pense parfois à Sonate d’automne, en beaucoup moins puissant), elle est évidemment bouleversée par l’anticipation de cette mort tant redoutée. C’est la véritable mère du réalisateur qui joue ce personnage, alors qu’elle se remettait elle-même d’un cancer dans la vie réelle. On comprend alors à quel point les ressorts émotionnels du film viennent de l’expérience propre du réalisateur. En se livrant de manière si personnelle, Franco Lolli réussit à trouver la bonne note pour faire résonner son récit, et le parsème de très beaux moments. Le point de vue qu’il nous donne sur Sylvia nous permet de comprendre tous les sentiments paradoxaux qui la traversent, sans que toutes les clés du personnage nous soient données.
Malheureusement, on a l’impression que le réalisateur dans la deuxième partie du film est un peu dépassé, comme le personnage, par toutes les pistes qu’il a lancées. Le récit s’étire alors sans que l’écriture soit à la hauteur des personnages qu’il réussit à faire vivre. La poésie se dilue peu à peu, les scènes s’alourdissent et l’ennui pointe le bout de son nez. C’est d’autant plus frustrant Franco Lolli réussit le plus dur en nous impliquant dans son récit et n’avait plus qu’à cueillir des fruits prêts à tomber. Au lieu de cela, on sort de la salle avec toujours cette sensation que ce réalisateur a des choses à montrer, mais qu’il n’a pas encore dévoilé tout son talent.
Ligitante, de Franco Lolli. Avec Carolina Sanín, Leticia Gomes, Antonio Martínez, Vladimir Durán, Alejandra Sarria