Comme des bêtes: L’insurrection qui ne vient pas…

Chris Renaud, la moitié ricaine des deux Moi, Moche et Méchant, se lance aujourd’hui dans une sympathique potacherie : Comme des bêtes. C’est l’été et il n’est pas interdit de se détendre, on ne va pas être trop méchant avec la dernière production d’Universal. Pour tout vous dire, on peut trouver que le récit a du mal à démarrer, mais il est difficile de rester de marbre face à tant de minionneries. On a, il est vrai, au début du film, comme l’impression de se retrouver en mode procrastination devant l’intégralité des vidéos cutes, lolcats et autre funny puppies disponible sur YouTube. Que voulez-vous, la critique est désarmée à la vue de ces bestioles.

Heureusement, débarque Snowball, un adorable petit lapin, et sa bande de bras cassés. Le film prend alors une direction savoureuse. Certes, Snowball est un lapinou tout ce qu’il y a de choupinou, mais il s’avère surtout le leader d’un Comité Invisible animalier. À l’instar du dernier cauchemar de Manuel Valls, le groupuscule mené par Snowball a la ferme intention de tenir la rue et refuser toute domestication par le système. Le but de ce Julien Coupat à poil blanc est de constituer une structure sociale parallèle et d’élever la dissimulation au rang d’art, les égouts sont son nouveau Tarnac. Si Pierre Coffin est bien l’inventeur des Minions dans Moi Moche et Méchant, tout porte à croire que leurs capacités à subvertir le système film provient de l’esprit un peu anar de Chris Renaud. Snowball, le lapin un peu timbré et son groupuscule en sont la preuve, l’aspect essentiellement inoffensif de Les Minions, le long métrage de Pierre Coffin en est une autre.

Et vive la révolution bande de nazes !

Il est bien plus aisé d’identifier un cochon et un caméléon que de différencier deux minions. Toujours est-il que l’utilisation scénaristique du comportement de ce groupuscule libertaire rappelle la façon dont les Minions tentaient de faire disjoncter le programme des deux Moi, Moche et Méchant. Lorsque Snowball balance son « Et vive la révolution bande de nazes ! » avant de s’engouffrer dans les sous terrains de la ville, on se prend à espérer qu’Universal ai l’intelligence de proposer à son jeune public une version modernisée et de la fable de La Fontaine « Le chien et le Loup ». Malheureusement, la suite ne fera que nous décevoir. Les ambitions subversives de la nébuleuse conduite par Snowball seront tuées dans l’œuf par les aspirations de la bromance entre Max et Duke, un terre-neuve un peu bâtard qui lui fait office d’acolyte. Vivre avec un collier au cou, profiter du chauffage et l’air conditionné ainsi que de la bouffe à volonté est bien trop séduisant pour se risquer à affronter un monde dont les règles sont à réinventer. On comprendra vite, à la fin du récit, que toute volonté de refuser le système et de le combattre ne sont que les expressions d’un manque d’affection.

Pour autant, les pulsions libertaires qui poursuivent la filmographie de Chris Renaud semblent trop profondes pour que l’on s’en tienne à ce triste constat. C’est à se demander si Universal n’affuble pas le cinéaste à chaque fois d’un side kicks pour l’obliger à rentrer dans le droit chemin. Après lui avoir mis Pierre Coffin dans les pattes, c’est carrément le producteur de Moi Moche et Méchant qui signe aujourd’hui la coréalisation. Preuve qu’Universal l’observe de près et cherche à bâillonner le cinéaste du Lorax. Il est plus que peu probable que Chris Renaud puisse un jour, au contraire d’un Tim Burton, voler de ses propres ailes. Sans doute est-il, au fond, bien content de trouver au sein d’Universal de quoi se chauffer et se nourrir.

Une dernière chose, on ne saurait vous conseiller, si vous vous risquez à voir Comme des bêtes, de privilégier la version originale. Si Snowball est de loin le personnage le plus charismatique du film, il ne faut pas oublier que le héros est Max, un chien qui n’aspire qu’à la tranquillité du foyer et profiter le plus possible de sa maitresse. L’acteur qui lui donne sa voix dans la version d’origine, n’est nul autre que Louis C.K. qui offre alors à son personnage une dimension névrotique totalement absente de l’adaptation française qui doit se rabattre sur le transparent Philippe Lacheau (Babysitting).

Comme des bêtes, de Chris Renaud et Yarrow Cheney. 1h30. Sortie le 27 juillet 2016

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