All we imagine as light : C’est quoi les Mumbai ?

Payal Kapadia met fin cette année à une longue période de disette du cinéma indien à Cannes. Celui-ci en était absent depuis 1994 (Destinée de Shaji N. Karun) et la pression était donc forte pour la réalisatrice dont c’est le deuxième long-métrage, après le formidable documentaire Toute une nuit sans savoir.

Avec All we imagine as light, Payal Kapadia fait le choix de la fiction pour raconter l’Inde. A travers le portrait tout en retenue et en sensibilité de deux infirmières en colocation, Prabha et Anu, qui viendront en aide à leur amie Parvaty, chassée de son domicile. Le film se divise en deux parties qui s’opposent et se font miroir : une partie dans la ville dense et illuminée de Mumbai et une partie dans un village de campagne.

Dans une sélection riche en films démonstratifs et bruyants, on éprouve un plaisir teinté de soulagement à se plonger dans une œuvre qui n’a pas besoin de surligner sa beauté. Payal Kapadia laisse vivre ses personnages, aidée en cela par le trio d’actrices à l’alchimie ravissante. C’est la sororité en action que nous laisse voir la réalisatrice, une sororité face aux épreuves que doivent traverser ces trois femmes dans leur vie sentimentale et professionnelle. Si All we imagine as light n’est pas aussi frontalement politique que le documentaire qui a fait connaître Payal Kapadia, il donne progressivement à voir beaucoup des combats qui traversent la société indienne. L’exil forcé de Parvaty est dû à un projet immobilier destiné aux riches, Anu est amoureuse d’un musulman et craint le courroux de sa famille dans une société où les religions comme les castes séparent strictement les individus, Prabha cherche sa place alors que son mari est absent et qu’elle n’arrive pas à se libérer de cette union qui n’est plus que théorique.

Les hommes sont à la marge du film

En mêlant ces trois intrigues, Payal Kapadia réussit à sublimer les liens qui unissent ces trois femmes et à les inscrire dans l’actualité de la société indienne. Un tour de force d’écriture et de mise en scène tout en subtilité. Payal Kapadia semble, presque sans forcer, réussir à capter la lumière de son pays ainsi que ses zones d’ombre.

La deuxième partie du film cherche des résolutions dans un éloignement géographique qui permet aux personnages de s’extérioriser et donc de se trouver. Les mystères de la nuit sont en effet propices à l’évasion et c’est alors que ces femmes trouveront des failles dans les carcans qui les oppressent. Le dernier plan, magnifique et sobre, nous imprime délicatement la rétine et clôt parfaitement ce qui est clairement le plus beau film de cette sélection.

All we imagine as light, un film de Payal Kapadia avec Kani Kusruti, Divya Prabha et Chhaya Kadam

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