Ce serait mentir de dire que j’avais une quelconque attente en entrant dans la salle où m’attendaient les nouvelles aventures de Venom. Quoique si : serait-il possible de faire pire que le film de Ruben Fleischer, son heure et quarante minutes de vide abyssal et son Tom Hardy dans un bocal à homards ? Malgré le sabotage de son Mowgli, on pouvait tout de même espérer un tant quoi peu quelque chose de la part d’Andy Serkis. L’espoir, c’était bien ça, ce qu’on a à peu près tous ressenti lorsqu’il a été annoncé à la réalisation. Vous savez quoi ? Ce mot, vous pouvez l’écrire en taille 72 sur une feuille A3, allumer la feuille avec un briquet et le jeter par une fenêtre (oui, comme dans Mourir peut attendre), puisque Andy Serkis et Tom Hardy n’en ont : littéralement rien à foutre. Venom : Let There Be Carnage est en un sens fabuleux, puisque je ne saurais toujours pas dire s’il est juste mauvais, ou si tout le monde en fait littéralement exprès et l’assume complètement.
On pourrait résumer l’intrigue de Let There Be Carnage sur un timbre poste, ce qui est sûrement dû au fait que Tom Hardy a contribué au scénario (oui) avec Kelly Marcel (scénariste de 50 nuances de Grey… et co-scénariste du premier opus) en plus d’être cette fois-ci producteur (double-oui) : tueur multirécidiviste à la veille de son exécution, Cletus Kasady (ou Carnage pour les intimes) demande à Eddie Brock de lui rendre visite en prison. Ça part en cacahuète, Carnage s’échappe et devient lui aussi un Symbiote. Pendant ce temps, Eddie et Venom s’engueulent comme un vieux couple. Mais le synopsis officiel c’est ça : « Tom Hardy est de retour sur grand écran sous les traits de Venom, l’un des personnages les plus complexes de l’univers Marvel ».
Des plus complexes, on vous a dit. C’est pour ça qu’Eddie et Venom se disputent pour que le premier profite d’une télé 4K dernier cri (avant qu’elle soit balancée par la fenêtre) ou que le dernier puisse bouffer autre chose que des poules ou des M&M’s (oui). C’est aussi pour ça que la relation entre Eddie et Venom est ouvertement comparée à celle d’un couple homosexuel dont l’un souhaite que l’autre vive dans son ombre, et où la libération de Venom reviendrait à « sortir du placard ». Ça va, on vous dérange pas trop avec votre cynisme puant ? Après il y a aussi quelques scènes d’action, mais elles sont tellement montées à la truelle et en accéléré qu’honnêtement, on a même pas le temps d’essayer de comprendre quoi que ce soit que tout a déjà explosé. C’est sûrement pour cette raison que le film ne dure qu’à peine 1h30. Et heureusement.
Je le répète : Tom Hardy est cette fois-ci acteur, scénariste et producteur. Il donne autant l’impression de tout donner que de s’en foutre totalement. Mais pour les autres, c’est encore pire : Anne, l’ex d’Eddie (Michelle Williams) et son mec docteur (Reid Scott) sont de retour. Pour le premier film, l’actrice avait totalement avoué avoir accepté le rôle parce qu’il faut bien parfois toucher un joli chèque. Là, le scénario en joue complètement : elle et son mari se demandent s’ils sont bien obligés de se retrouver mêlés à cette galère, apparaissent cinq minutes histoire de et puis s’en vont comme si de rien n’était.
Vous avez noté que je ne parle pas de Carnage ? Peut-être parce que c’est le même effet que procure le film : une parenthèse inutile, puisqu’on ne retiendra rien de Woody Harrelson et Naomie Harris, au profit d’une scène post-générique ultra-prévisible et tout autant cynique. Tant d’années à ce que Sony chouine de son côté pour en arriver là. Bref : tout ça pour ça. Mais peut-être ont-ils enfin trouvé la recette qui marche : s’en foutre jusqu’au bout.
Venom : Let There Be Carnage, d’Andy Serkis. Avec Tom Hardy, Woody Harrelson, Naomie Harris, Michelle Williams. Sortie française le 20 octobre 2021.