[Étrange] Life Guidance : Le CAAPitALIISmE C’eST PaAAs BiEEN

Sur le papier, le nouveau film de Ruth Mader (réalisatrice autrichienne) avait de quoi faire envie à la clique Cinématraquienne. Une sorte de dystopie aseptisée où le monde du travail englobe le reste, ça ressemble à notre pire cauchemar, et pas n’importe quel pire cauchemar : la France du Général Macron. Life Guidance raconte l’histoire d’Alexander Dworsky, cadre efficace et froid comme toute la société qu’il entoure. Alexander a une femme, qu’il aime même si ça ne se voit pas. Il a un fils, qu’il aime même si ça ne se voit pas. Et puis un jour, un souci de productivité au travail mène à des doutes, des incertitudes : on lui affecte un employé de Life Guidance qui est censé l’aider à restructurer sa vie. Évidemment, c’est la dégringolade.

À l’image aussi, Life Guidance avait de quoi nous plaire : son esthétique léchée est plus qu’irréprochable, chaque plan est délicieux de précision et de finesse. C’est froid, austère, mais très fort aussi. On ressent tout de suite l’ambiance irrespirable d’une société dystopique qui paraît futuriste tout en étant très familière. Seulement voilà, malgré le papier et l’image, ce film est une catastrophe.

Déjà, c’est totalement incompréhensible. Ceci n’est pas une vanne contre la variété autrichienne de l’allemand, mais une attaque envers le scénario de ce film. Vouloir ne pas trop expliquer au spectateur et le laisser réfléchir, c’est bien. Mais choisir une narration à peu près aussi hermétique qu’un discours de Jean-Michel Blanquer, ça l’est beaucoup moins. On se prend à regarder les jolis plans et à oublier de s’intéresser aux aventures de ce cher Alexander Dworsky. Difficile d’ailleurs d’éprouver de l’empathie pour ce type qui se découvre soudain une âme en pleine quarantaine ; soudainement, il décide d’aller voir comment vivent les pauvres. La conscience sociale des riches apparemment, ça ressemble à une visite au zoo.

Ensuite, le propos est traité avec la subtilité d’un troupeau éléphant en pleine partie de 1 2 3 soleil. En effet, l’hypercapitalisme, c’est pas forcément très cool. La déshumanisation, c’est flippant. Une vie familiale subordonnée à la réussite au travail, c’est affreux. On pense au Brazil de Gilliam, au Bienvenue à Gattaca d’Andrew Niccol, ou même à Black Mirror. Mais on y pense parce que ces œuvres ont déjà dit tout ça, en mieux. Même l’aspect science-fiction apparaît comme déplacé ici : Life Guidance ressemble plus à un film donneur de leçons qu’à un avertissement. Le problème, c’est que lui-même ne semble pas avoir assez révisé son cours… Peut-être aurait-il pu avoir un impact différent s’il était sorti il y a vingt ans, avant le New Management et la Start-Up mania.

Life Guidance, de Ruth Mader. Avec Fritz Karl, Katharina Lorenz.

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