Festival d’Annecy jour 3 Dans la cours des grands

Cette nuit fut encore plus courte que la précédente. Mon hôte ayant une vie passablement agitée 4 petites heures pour bien commencer cette 3ème journée sur le Festival d’Annecy, avec un nouveau venu, le soleil. Direction la salle de conférence de Bonlieu pour un entretien de 30 minutes avec Claude Barras, qui semblait en aussi bonne forme que moi, la faute au succès toujours plus et à l’accueil des plus enthousiastes de son premier long-métrage Ma vie de courgette. Il est revenu sur l’origine du projet, et sur les 10 années de son long développement. Son travail d’écriture avec Céline Sciamma, sa passion pour les marionnettes, et tout ce qu’il peut entreprendre de ses mains, son désir d’offrir des émotions complexes aux plus jeunes des publics.

Tartakovsky est en quelque sorte le génie d’Aladdin toujours coincé dans sa lampe.

Puis vint le moment que j’attendais le plus du festival, le work in progress de l’ultime saison de la génialissime série de Genndy Tartakovsky, Samouraï Jack, dont on avait plus de nouvelles depuis plus de 10 ans. L’histoire d’un samouraï envoyé dans notre futur mais cherchant à rejoindre le passé, son présent, afin de tuer le démon Aku qui règne sur le monde. Je le dis simplement, c’est à coup sûr ma série d’animation préférée. Le talent de Tartakovsky irradie le moindre geste, le moindre mouvement. Un chef-d’œuvre de mise en scène, de cartoon, l’art de raconter avec les images plus qu’avec les mots (Coucou Gaël je te vois, oui je vais écrire sur la série, j’ai promis).

Tartakovsky est en quelque sorte le génie d’Aladdin toujours coincé dans sa lampe. Il n’a jamais vraiment réussi à rayonner comme il le devrait, et n’a pas la reconnaissance que mérite son immense travail. Sa carrière est une succession de déconvenues. Que se soit chez Lucas Films après s’être occupé des premiers Clone Wars, ou chez Sony après la débandade Hotel Transylvania qui a conduit à l’annulation de son Popeye. Il revient en fin d’année avec sa plus belle création originale, grâce à son producteur qui le propose de clôturer sa série à travers 10 épisodes de 22 min. La série initialement développée par Cartoon Network passera pour son ultime saison entre les mains de la chaine Adult Swim, bien connue pour sa liberté de ton, avec récemment l’extraordinaire Rick and Morty. Une nouvelle version plus noire, plus adulte, mais qui ne perd rien de son ADN initiale, où l’on retrouve un Jack vieillit, en proie aux doutes quant à sa mission.

Tartakovsky a parlé de la difficulté d’être ambitieux à Hollywood, et de proposer des choses originales, qui ne rentrent dans aucune case. Dénonçant des exécutifs qui refusent un projet, bien que novateur, parce qu’ils ne savent pas comment le vendre. Il n’avait pas d’animatic terminés à nous montrer, mais nous on a pu apercevoir des planches de character design, d’arrières plans, et de story-board animé pour deux séquences. Tartakovsky s’est mis à bruiter, et jouer les séquences à tel point que nous y étions. L’impression pendant quelques minutes de faire partie de l’équipe technique de la série à un brief de mi-parcours. Mes yeux et mes oreilles étaient grands ouverts. Le talent, et la passion au service du meilleur.

Tartakovsky a parlé de la difficulté d’être ambitieux à hollywood

À peine remis de mes émotions que je me précipite vers la grande salle de Bonlieu pour la masterclass de Guillermo Del Toro. J’use de ma filouterie et réussi à rentrer en premier dans la salle, choisissant les meilleures places face au géant mexicain venu nous parler de l’art du storytelling, et au passage nous présenter les premières images de la série Trollhunters adaptée de son roman, produit par DreamWorks Animation et diffusé sur Netflix en décembre. Le journaliste de Variety revient sur sa carrière, lui demandant d’expliciter son rapport à l’image, et son sens du détail. Del Toro en vient à raconter plusieurs anecdotes, et je comprends alors que ce fils de personne du milieu, à réussi à parvenir où il en est à la force de sa conviction, ne renonçant devant rien. Pas avare de conseils, il a invité les futurs techniciens du milieu à bien se connaitre eux-mêmes, leurs points forts, mais surtout leurs faiblesses. Des paroles simples mais qu’il fait toujours du bien de se faire rappeler. À l’instar de Tartakovsky, le réalisateur mexicain explique que le plus important est de ne jamais renoncer, pas même devant les « no » des exécutifs. Phrase qu’ils se plaisent à dire mais ont du mal à entendre. En 45 minutes, Del Toro se présente comme un artiste intègre, qui ne lâche devant rien. « I won’t do movies I don’t like. You don’t fuck without a boner ! »

Jeffrey Katzenberg était l’invité surprise de l’évènement. Le grand producteur et co-fondateur de DreamWorks s’est vu remettre la première accréditation à vie de l’histoire du festival. La masterclass s’est terminée sur une vidéo hommage de son travail, de Disney à Dreamworks. Le festival lui a même remis une accréditation à vie pour le festival, créé pour l’occasion. Ce n’est pas la première collaboration entre Del Toro et DreamWorks, puis que l’on doit au réalisateur les morts du père dans Dragons 2 et de la mère dans Kung-Fu Panda. Il a également cuté 7 minutes du film Megamind finit en son début et sa fin, ce qui lui a valu une volée de doigts en l’air de la part de son réalisateur Tom McGrath, mort de rire, assis juste devant moi avec sa femme, venu présenter son prochain film un work in progress Boss Baby qui sortira à l’été 2017. Il a présenté et commenté avec Del Toro, des images inédites de leur série Trollhunters, qui promet un potentiel de cool assez élevé. On y retrouve les thèmes chers au réalisateur, un monde sous un monde, baigné dans un univers à la Amblin. L’animation est soignée, très rythmée, laissant présager un show de qualité. À voir comment l’histoire navigue entre le monde fantastique et le nôtre. Affaire à suivre en décembre sur Netflix. Pour l’anecdote Del Toro a fait ses premiers pas dans l’animation avec des petits films réalisés gamin avec sa super 8 où il mettait en scène une patate qui tue une famille et finit écraser par une voiture en traversant la rue. Pendant un peu plus d’une heure, Del Toro et Katzenberg ont partagé dans une énergie communicative leur passion pour le cinéma et l’animation, art complet, permettant les plus grandes libertés.

I won’t do movies I don’t like. You don’t fuck without a boner !

Beaucoup de monde à la projection du soir dans la grande salle de Bonlieu pour découvrir le nouveau film de Jean-François Laguionie :  Louise en Hiver. Laguionie est un cador de l’animation, et un habitué du festival puisqu’il était pour la première fois en 1966 venu présenter son court-métrage La Demoiselle et le Violoncelliste, produit par Paul Grimault dont il est l’élève pendant plusieurs années. Comme son précédent film Le Tableau, Louise en hiver éblouit par sa direction artistique magnifique, une facture soignée. Une succession de tableaux naturalistes pour narrer l’année d’une vieille dame qui manque son train de retour après ses vacances d’été au bord de la mer. Seul dans la ville elle décide de s’installer sur la plage dans une cabane construite de ses mains. Laguionie parle avec poésie de la solitude et de vieillesse, ce qui lui a valu un tonnerre d’applaudissements en fin de séance.

Le court-métrage d’ouverture #Ripaille propose une visite guidée de musée assez mouvementée.

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