Terreur de cinéma : celui qui pensait que quelqu’un s’était planqué sous son siège

Pour Halloween, on a cette année demandé aux chroniqueurs.euses de Cinématraque de nous raconter leur plus grosse flippe de cinéma. Ce peut être dedans l’écran, dedans la salle, etc. L’exercice d’écriture est libre, la question ouverte. Ici, c’est JB qui y répond. Pour lire tous les articles de ce cycle Halloween, cliquez ici.

Nous sommes un mardi soir d’été, à Rouen. Il fait beau, et les gens dans la rue sont contents comme quand il fait beau un mardi soir d’été en Normandie. Moi je suis d’autant plus content que ce soir, je vais voir Hérédité en avant-première au cinéma multiplex du centre commercial, à l’occasion de ce qu’ils appellent une « horror night ». Les précédentes programmées, c’étaient apparemment des trucs du style Conjuring ou Annabelle. Je trouve chouette qu’ils jouent aussi ainsi la carte d’une horreur moins jumpscare, plus psychologisante. En tout cas du peu que j’en avais lu, Hérédité serait de ces films-ci.

Howwow night

« Deux places pour la horror night s’vous plaît. » Je me souviens avoir fait mon accent dont Madame dit qu’il est texan ridicule, mais dont je pense en réalité qu’il est assez new-yorkais chic quand même, pour dire « horror night ». Le ton, en tout cas, était assuré, un peu détaché. Celui d’un mec qui n’y va pas pour les frissons adolescents, mais bien pour voir un bon film pensum d’adulte. Mais oui, vous êtes mignons avec votre folklore « howwow night », et puis c’est chouette si ça attire des jeunes vers le bon cinéma de terreur.

On s’échange des petits sourires avec Madame devant le couloir d’entrée vers la salle, où un monsieur déguisé en monstre nous attend. C’est mignon.

Moins mignon, dans ce même couloir, tous les employés du cinéma grimés en monstres sanguinaires qui font des « bouh » ou te frôlent l’épaule. Il fait noir, et déjà je sens que j’ai un peu chaud. Dans la salle, une musique metal à fond les ballons, et il fait également tout noir. Je m’agrippe à Madame : « Je suis sûr qu’il y a des gens sous les sièges et qu’ils vont choper nos pieds. » Elle abonde dans ce sens. J’allume ma lumière de téléphone et passe la salle, vide, en revue. Je m’accroupis, regarde sous les sièges, le cœur battant fort. A priori, rien. On s’assoit le plus loin possible de la porte par laquelle les monstres du couloir pourraient rentrer, le dos enfoncé contre le siège, la tête dans les épaules. La musique metal bombarde nos oreilles, une sueur froide coule dans mon dos. Je suis, comment dirais-je… Terrifié.

Toutes les 2 minutes, je regarde sous le siège avec ma lumière de téléphone. RAS. Des gens entrent dans la salle, on les éclaire, apeurés, mais ils ont l’air normaux et même qu’ils ont des pop-corns. On n’est, de fait, plus tout seuls, en cas d’invasion zombie pour de vrai. Après j’aurai je pense du mal à en faire des copains parce qu’ils ont pas l’air de gens avec qui je suis en général copain, mais si on a bien appris quelque chose de Walking Dead, c’est que face aux zombies, on a plutôt intérêt d’être copains pour survivre.

Mes futurs amis, à l’entrée de la salle de laquelle on ne peut ressortir qu’avec des acouphènes, rient doucement mais n’ont pas l’air ultra rassurés non plus. Nous ne serons que quatre à cette horror night, ainsi que dans le monde d’après. L’écran s’allume.

Jumpscares à gogo

Une grosse voix lance un « bienvenue à la HOOOORROR NIGHT ». Puis se lance une bande-annonce. Enfin pas tout à fait. C’est un montage de jumpscares. Des morceaux de films juste pour sursauter. 25 secondes d’Insidious, 25 secondes de Sinister, Shining, Conjuring etc. juste les jumpscares. Entre deux, la grosse voix refait son « HOOOORROR NIGHT ». Je me liquéfie, Madame aussi. Le montage nous semble durer une éternité.

Puis le film démarre, et c’est presque un soulagement. D’autant plus que comme tout bon film d’horreur, Hérédité prend son temps. L’atmosphère est lourde, mais la terreur infuse doucement. Pourtant, le cœur bat à 180 dès le générique du début, et ne ralentira jamais vraiment. À la mi-film, lorsque tout commence à vraiment se barrer en cacahuète et le travail sonore de prendre sens, nous sommes complètement tétanisés. Madame se bouche les oreilles et ne regarde plus l’écran que d’un œil, et moi je fixe mon attention sur le siège de devant moi, histoire de ne faire du film qu’un arrière-plan. À fréquence régulière, nous vérifions sous notre siège.

On devrait quitter la salle, mais ça induirait de repasser dans le couloir, et c’est certain qu’il y aura encore des gens dedans pour nous faire peur. Plus rien n’est vraiment rationnel dans nos façons de penser, mais on n’attend qu’une chose, les lumières qui se rallument. Mais se rallumeront-elles, ou bien y a-t-il une autre diablerie une fois le film terminé ? Finalement, elles se rallument. On sort dans un couloir éclairé, sans monstre. Il fait nuit et frais dans Rouen, mais c’est pas grave. « C’était pas mal, le film, j’ai l’impression, non ? » Oui, je crois aussi. Mais on va tout de même le revoir, dans d’autres conditions. Finalement, c’était mieux que « pas mal », hors horror night.

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