S’il fallait garder de 2013 une image, un plan, un photogramme : les rédacteurs de Cinématraque se prêtent à l’exercice.
Parmi les belles propositions ciné de 2013, celle d’un Brian De Palma rajeuni, offrant avec Passion, remake très personnel du dernier film d’Alain Corneau, l’un de ces spectacles délicieusement pervers dont il a le secret. Retour donc aux premières amours, avec le motif vieux comme la cinéphilie de la rivalité entre deux femmes, une blonde et une brune, autour d’une vague histoire de promotion dans une grande agence de pub. Ce plan nous offre le visage virginal de la Blonde Christine (Rachel Mc Adams), lors d’une étreinte avec la Brune Isabelle (Noomi Rapace) supposée sceller l’aveu de leur affection mutuelle. Sa beauté tient dans son ambiguïté basique. Dans le cadre vénéneux installé jusqu’ici par le récit, tout est dit en une image, dans l’expression de Christine, d’une douceur annonçant la morsure, réactualisation sereine du baiser de Judas.
Image de l’année ? Pas forcément, ladite année ayant été porteuse d’une infinité d’histoires pas moins stimulantes, et par là même des plans allant avec. Ce choix se veut surtout témoin d’un attachement à l’admirable potentiel de récupération d’un cinéaste à la carrière incertaine depuis une décennie. Revenir à la veine la plus grossièrement efficace de son cinéma, sans pour autant donner l’impression de nier le cours du monde actuel (il est question ici de portable, de nouvelles images, en droite ligne du précédent Redacted) est l’option artistique la plus humble et prometteuse, de la part d’un cinéaste comptant parmi les plus risque-tout et obstinément chercheurs de formes vives du cinéma contemporain.