Agents of S.H.I.E.L.D. La série qui existe, malgré tout.

Les années passent et l’univers Marvel étend plus que jamais sa domination. Le MCU, pour les intimes, s’enrichit de films, mais aussi de programmes télévisuels. Celles de Netflix font assez de bruit et reçoivent un accueil critique globalement très bon. Mais sur ABC, une série dans le même univers continue sa lancée dans un relatif anonymat : Agents of SHIELD vient d’achever sa troisième saison. C’est l’heure du bilan !

C’est l’heure du bilan !

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Comment faire une série Marvel, sans (trop) utiliser de personnages Marvel ?

Il est complexe de décrire ce qu’est Agents of SHIELD, tant elle semble avoir cherché son identité tout au long de ces trois saisons. La fiction télévisuelle doit, en effet, essayer de se construire dans une situation assez difficile. On parle beaucoup d’univers partagé pour les films et les séries TV Marvel. Il faut mettre un petit bémol à cela, si toutes les intrigues se passent bien dans le même système, il y a un fossé entre les longs métrages et les programmes télé. Au cinéma, il n’est, pour l’instant, quasiment jamais fait mention des séries et de leur impact sur l’univers. Cela serait dû à Ike Perlmutter, l’un des patrons de Marvel qui voit d’un mauvais œil un tel rapprochement. On doit aussi à ce monsieur la décision de ne pas faire de film de superhéroïne à l’époque, désormais révolue, où il avait son mot à dire autant sur les longs métrages que sur les séries. Ces dernières doivent donc se raccrocher à un univers qui existe sans elles et sur lequel elles ne peuvent influer qu’à la marge. Celles de Netflix ont trouvé leur voie en se concentrant sur des figures non utilisées (Luke Cage, Jessica Jones) où de façon maladroite (Daredevil) cinéma, mais déjà présentes dans les comics et suffisamment connues et intéressantes pour être porteurs. Agents of SHIELD, au contraire, a inventé ses personnages au sein du SHIELD et tente de se raccrocher à l’univers Marvel sans pouvoir trop en montrer ce qui la laisse dans un entre-deux décevant. Pendant trois saisons, la série a essayé de trouver son rythme de croisière et il n’est pas sûr qu’elle y soit parvenue.

le personnage de Phil Coulson est l’une des réussites des scénaristes

En guise de relais entre les films et la série, le personnage de Phil Coulson a été particulièrement développé et c’est l’une des réussites des scénaristes. Adjoint tué par Loki dans les Avengers, Coulson allie un humour pince-sans-rire et un côté héros-qui-prend-toujours-les-bonnes-décisions-dans-l’adversité qui colle parfaitement à l’esprit Marvel. Autour de ce personnage, la série s’est d’abord construite comme un « Monster of the Day » où chaque épisode présentait l’équipe du SHIELD face à une menace différente — une sorte de X-Files chez Marvel. Mais un budget limité, et l’impossibilité d’utiliser les figures les plus emblématiques de la Maison des Idées a vite rendu cette idée catastrophique. Les allusions aux Avengers et consorts apparaissaient toutes artificielles et la série semblait promise à une annulation rapide étant donné la chute abrupte des audiences et le retour très froid des critiques.

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C’est aussi une série où on aime bien se mettre en rang d’o(i)gnon

Et là, tout a changé grâce à un ex machina inattendu : la sortie du long métrage The Winter Soldier. La série a su habilement s’appuyer sur le scénario du film qui fait du SHIELD une agence corrompue par HYDRA. Le fil rouge du show télévisuel s’est renforcé autour de la recherche de la taupe et Agents of Shield s’est révélé, enfin, intéressant. Une bonne partie du public était déjà parti, mais les critiques sont redevenues positives et le noyau de fidèles qui n’avait pas lâché pouvait se réjouir de la métamorphose de la série.

Le format du show a en effet totalement changé. Le programme s’est transformé de feuilleton, avec une histoire par épisode en fiction télévisuelle à suivre sur le long terme. Une mutation qui rappelle un peu l’évolution de Fringe. Cela permet de rendre les enjeux plus profonds sans avoir à créer de nouvelles menaces artificielles de manière régulière. Ce fut particulièrement intéressant de voir à quel point le cinéma a pu transformer dans le bon sens le concept même de la série. Les scénaristes ont su profiter du cross média Marvel pour changer leur recette en cours de route, avec culot.

Une mutation qui rappelle un peu l’évolution de Fringe.

La deuxième saison s’est donc centrée sur la découverte des inhumains et la troisième sur l’arrivée de Hive, le grand méchant. Agents of SHIELD crée sa propre mythologie avec ses thématiques et ses personnages caractéristiques. L’équipe du SHIELD est d’ailleurs réussie, le spectateur s’attache aux différents agents et si les acteurs ne sont jamais transcendants, ils font le boulot et on suit leurs aventures avec plaisir. Malheureusement, la série, après trois saisons, montre toujours des limites qui semblent difficiles à dépasser.

Agents of SHIELD est, avant tout, vendue comme une série Marvel. Cela la force à multiplier les clins d’œil et les références sans avoir le budget ni l’autorisation par les grandes pontes de pouvoir utiliser les figures véritablement moteurs du monde des comics. Les personnages aiment parler de Thor ou de Hulk, mais cela ne suffit pas à insuffler au programme la force de l’univers Marvel. On a que très rarement l’impression de regarder une série Marvel. Les inhumains sont vraiment le concept tiré des comics sur lequel la fiction télévisuelle met un coup de projecteur. Cela peut servir l’intérêt plus général de Marvel Studios, puisque n’ayant pas le droit ciné des X-Men. Les inhumains font figure de remplaçants pour multiplier les êtres aux capacités surnaturelles et reprendre les thématiques d’identité et du rapport entre les humains et les personnes dotées de pouvoirs. Malheureusement, les Inhumains n’ont vraiment pas le charisme des X-Men et la série a du mal à les exploiter avec justesse.

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Une fois qu’on s’en rend compte pour les oignons, on ne voit que ça

À côté de ça, en soi, la série n’est pas assez bonne pour attirer ceux qui ne suivent pas du tout l’univers Marvel. Elle est divertissante et sympathique et propose même des moments vraiment bien écrits et des rebondissements bien ficelés. Il est cependant difficile de s’imaginer un néophyte total se prendre d’intérêt pour ces histoires d’espionnage tant il existe de séries jouant bien plus efficacement dans la même cour.

La série reste intéressante, justement, pour son développement si complexe

C’est dans cet entre-deux un peu bancal qu’Agents of SHIELD tente d’exister. Renouvelée pour une saison 4, ABC fait toujours confiance à Marvel en lui laissant développer son programme malgré des audiences loin d’être fantastiques. Des spin-off ont été évoqués, mais rien d’annoncé officiellement pour l’instant et on se demande comment la chaîne pourrait faire vivre plusieurs fictions télévisuelles qui seraient fatalement confrontées aux mêmes problèmes qu’Agents of SHIELD. La série reste néanmoins intéressante, justement, pour son développement si complexe. Il est très difficile de savoir ce que va donner la quatrième saison et dans quel sens va aller la série. Les scénaristes ne doivent en avoir eux-mêmes une idée très vague. Cette série, condamnée à ne jamais briller tant elle est lestée par les défauts inhérents à son concept et à sa position bâtarde dans le MCU et aussi un cas assez unique dans le paysage audiovisuel. Elle permet donc d’observer des scénaristes, essayer de surmonter les obstacles en se raccrochant à un univers existant tout en inventant des histoires qui ne nuiront pas à la cohésion des films. Un exercice de contorsionniste assez passionnant finalement, sûrement plus que la série en elle-même.

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J’espère que je ne vous ai pas gâché la série

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