Festival d’Annecy jour 4 Marché du film, politique, et films de fin d’études

Après la masterclass d’hier de Guillermo Del Toro sur le storytelling et la présentation de sa série DreamWorks pour Netflix, Trollhunter, je me suis rendu le matin au casinon l’Impérial pour la conférence de presse du monsieur. Je suis juste dans les temps, je crains la foule et me dit que je risque de me retrouver tout derrière. J’ai été agréablement surpris quand je me suis rendu compte que nous n’étions qu’un petite vingtaine face au monstre mexicain. Une rencontre organisée pour toutes les personnes qui avaient fait des demandes d’interview individuelles. Del Toro s’est prêté au jeu des questions-réponses de façon enjouée, et a même commencé à se relancer lui-même sur la fin des 30 min quand il voyait qu’on ne pouvait plus poser de questions.

C’est un homme impressionnant pour diverses raisons, au-delà des qualités présentes dans ses films. On avait compris la veille que c’est un homme intègre, qui a réussi à faire carrière à la force de son intelligence et de son talent. Conscient que l’industrie et l’Art du cinéma évoluent, qu’ils ont moins l’aspect religieux qu’à son époque, il ne veut être le vieux con du « c’était mieux avant ».
Il rappelle l’importance du cinéma d’animation pour adulte, un médium choisi et pensé pour rappeler son histoire en citant le récent Anomalisa de Charlie Kaufman et Duke Johnson, et l’œuvre de Satoshi Kon, entre autres. Nous rappelant au passage qu’il n’a pas mis de côté son adaptation d’un Pinocchio sombre en stop-motion destiné aux adultes. Sur ses projets, et toujours avec humour il nous a fait un aveu ; sur son lit de mort, ses dernières paroles seront probablement « Les Montagnes hallucinées… » quand on lui demande si le projet de l’adaptation du chef-d’œuvre de Lovecraft verra le jour prochainement. Sur ses projets en cours, il nous  a également dit que beaucoup d’arcs narratifs prévus pour la version série animée de Pacific Rim se retrouveront dans le deuxième long-métrage dont il est producteur. Par ailleurs, il n’a pas préféré se prononcer sur un potentiel projet en langue espagnol par superstition, car à chaque fois les projets auraient été avortés.

ses dernières paroles seront probablement « Les Montagnes hallucinées… »

Sur des questions sur ses choix de mise en scène, et de propos, il nous a gratifiés d’un « form is content », comme une piqûre de rappel salvatrice. Del Toro n’est pas un collectionneur, il s’est lui-même comparé à un Michael Jackson de l’horreur dans sa façon d’entreposer les objets de toute sorte qu’il récupère et entrepose comme des reliques dans son église de maison. C’est un passionné, un curieux qui emmagasine pour mieux s’enrichir artistiquement. Un ogre de connaissance, de connaissance tout court, qui jongle pendant plus de 30 min entre Möebius, Gauguin, Metal Hurlant, les noms cités plus haut et bien d’autres. Il finit son discours par rappeler qu’il ne faut jamais baisser les bras, et toujours travailler avec des gens qu’on aime. Il a par exemple fait travailler sur Pacific Rim et Le Hobbit un mec avec qui il avait discuté dans un magasin de comics. Avant de se retirer, il tient à préciser la richesse de la singularité française au niveau de la BD et de l’animation, qui tendent à s’estomper et à se transformer comme un peu partout dans le monde en des pitchs, pilotes clefs en main de séries ou films de longs-métrages de fiction uniformisée. L’importance dans l’Art d’avoir un œil sur le monde, mais également de garder son identité personnelle, où l’on se dirige vers de bien tristes jours.

Puis je suis descendu de deux étages pour me rendre au MIFA, le Marché International du Film d’Animation d’Annecy, car bien qu’en marge ce marché fait partie intégrante du festival où professionnel, sociétés de prestataires techniques, techniciens de tous bords, et étudiants se croisent, se rencontrent, venus du monde entier. J’y suis resté deux bonnes heures, en évitant de prendre tous les goodies qui m’étaient proposées et… quoi… mais, que… UN FRANÇOIS HOLLANDE SAUVAGE APPARAÎT AU DÉTOUR D’UN STAND !

C’était donc pour lui les syndicalistes du FO et de la CGT paisiblement installés devant l’Impérial sous une pluie battante, et tout le ramdam de CRS, et un dispositif de sécurité particulièrement tendu. Le président a tenu à jeter un oeil sur la forme du cinéma d’animation, et de son nouveau pôle récemment installée dans la région, sourires et serrages de mains de coutume.

De retour sur Bonlieu je tombe un peu par hasard sur le réalisateur de Megamind et Madagascar dont je vous parlais hier, en fin de dédicace pour son nouveau film Boss Baby. Après deux trois mots échangés je suis donc reparti avec une belle litographie dédicacé de Tom McGrath.

L’espace devant les salles de Bonlieu était bondé et survolté à l’idée de voir le nouveau film des studios Illumination MacGuff Commes de Bêtes. Une fois rentrée dans la salle et profitant du passage de François Hollande sur la ville une bonne centaine d’étudiants ont tapé des mains, et scandé des « SPFA, arrête ton cinéma » pour protester contre la création d’un échelon junior moins rémunéré que les minimas actuels, dans sa « France qui va mieux » pour journée placée sous le signe de l’absurdité.

« SPFA, arrête ton cinéma »

Je ne pouvais pas me rendre à mon premier festival d’Annecy sans voir de films de fin d’études. On a attendu que la grande salle se vide pour assister à la projection d’une sélection de film de fin d’études, d’écoles des quatre coins du globe : Chine, Hongrie, États-Unis, Pologne, Finlande, Corée du Sud, France, Japon, Belgique, Pays-Bas et Allemagne. Un florilège qui éclaire bien la richesse de l’animation et des possibilités offertes par les différentes techniques, entre les mains d’esprits aussi imaginatifs que pluriels. Beaux, ou pas, durs, noir, traitants de sujets graves, historiques, ou bien légers et absurdes, illustratifs, il y en avait pour tous les goûts et toujours inventifs. De l’imaginaire d’un crabe en guerre contre l’armée d’un château de sable, à la chute des monuments de l’ex-URSS, au passé sombre de la Pologne pendant la Seconde Guerre mondiale, aux combats de moustache en passant par des conneries de gamin, ou la disparition du visage d’un homme dans un métro japonais. Une salle en ébullition portée par les équipes souvent présente des films en question. Impossible de mieux finir cette journée, et de rentrer le sourire aux lèvres en se disant qu’on a probablement assisté aux premiers films de futurs grands réalisateurs.

Dans le film des Gobelins du jour, une jeune danseuse en audition au Moulin Rouge se rappel ses débuts pour surmonter sa peur, et c’est plutôt joli.

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