Masters of Sex, saison 2 : phase plateau

La première saison de Masters of Sex nous avait éblouis par son intelligence et sa sensibilité, là où le sujet (l’étude en sexologie menée par le duo Masters & Johnson au tournant des années soixante) pouvait laisser craindre un traitement égrillard. Or, l’intérêt de la série résidait justement dans son écriture toute en subtilité, qui faisait se répondre, aux différents « cas » étudiés, les situations intimes du personnel médical.

La seconde saison, qui vient de s’achever sur Showtime, prend une direction sensiblement différente : en effet, l’étude menée tambour battant par Masters & Johnson dans sa première phase, se retrouve confrontée ici à de nombreux obstacles : la difficulté de William Masters à trouver un établissement qui accepte d’accueillir son étude, le recrutement de nouveaux cobayes, et surtout la relation complexe qu’entretiennent les deux scientifiques, et qui parasite littéralement leur travail.

C’est donc sur cette relation que se recentre la série, évacuant peu ou prou des personnages qui avaient été importants (le doyen Barton Scully, le Dr Haas), remplaçant en cours de route des intrigues secondaires par d’autres (le couple désaccordé de Betty et son milliardaire est ainsi oublié au profit de celui formé par les « handicapés sexuels » que sont Lester et Barb)… Ce faisant, la série perd légèrement en contraste (moins d’humour, moins de drames, moins de personnages et donc de péripéties), et retrouve le terrain quelque peu familier des histoires d’amour et d’infidélité qui font le miel des séries sentimentales.
A mesure que le mystère des personnages s’éclaircit (les rapports de Bill Masters et de son frère ; Virginia Johnson qui passe du statut de secrétaire volontariste et indépendante à celui d’assistante de recherche amoureuse), ceux-ci perdent un peu de leur piquant, même si l’écriture est toujours aussi passionnante tant les auteurs parviennent à donner une vision intime et surprenante de caractères et de situations somme toute classiques (le médecin psychorigide, le trio mari-femme-maîtresse, etc), en explorant en profondeur – plus qu’en les évacuant – les clichés liés à ces situations.

Episode 202

La série gagne en revanche franchement en intensité émotionnelle et surtout, en érotisme : ce ne sont plus des corps éclairés au néon dans une salle scientifique qui nous sont donnés voir, mais des personnages doucement enveloppés par l’éclairage tamisé d’un hôtel ou d’une chambre à coucher. La saison 2 de Masters of Sex parvient ainsi à être visuellement plus excitante que la première, tout en maintenant fermement son point de vue féministe – les hommes et les femmes y sont nus à égalité, dans tous les sens du terme.

Après avoir décrit avec précision le recueil des données de l’étude dans sa première saison, elle montre maintenant les difficultés pour les chercheurs de présenter cette étude à un public, qu’il soit scientifique (le rejet de divers hôpitaux) ou profane (un publiciste leur décroche une émission de vulgarisation scientifique sur la très prude CBS – le mot « sexe » n’y est pas une fois prononcé).
Comment parler de notions révolutionnaires sans révolutionner la pensée ? Jusqu’où peut-on dénaturer son travail afin de le rendre accessible ? Telles sont les questions que se pose en filigrane la série, avec son acuité désormais familière.

Ainsi, sans jamais se réduire à un regard rétrospectivement progressiste sur la question, Masters of Sex brosse peu à peu un portrait exhaustif et nuancé de la sexualité humaine, sa variété, sa complexité, toutes choses qui la rendent passionnante. Comme cette série.

Masters of Sex, saison 2. Série créée par Michelle Ashford, avec Michael Sheen, Lizzy Caplan, Caitlin Fitzgerald. USA, 2014, 12×50 minutes. La saison 2 a été diffusée du 13 juillet au 28 septembre 2014 sur Showtime, et actuellement sur OCS City.

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