FFCP 2024 : Rencontre avec l’équipe de Handsome Guys

La 19e édition du Festival du Film Coréen à Paris a déjà refermé ses portes le mardi 5 novembre. Une semaine de découverte(s) qui avait commencé sur les chapeaux de roue avec la projection de Handsome Guys, premier film du réalisateur Nam Dong-hyub, venu le présenter en compagnie de l’un de ses acteurs principaux, Lee Hee-joon, et son producteur Kim Won-kuk.

Remake du film Tucker et Dale fightent le MalHandsome Guys met en scène deux frères bien décidés à faire leur vie dans une maison de campagne, mais confrontés à un amoncellement de quiproquos. Un groupe de jeunes est persuadé que le duo les prend en chasse et qu’ils sont des purs psychopathes, alors que pas du tout. Ils ont même un chien trop mignon. Ça part donc en cacahuète, mais en plus il y a une histoire d’esprit vengeur. Double sortie en cacahuète, donc.

Pour parler un peu plus du film, nous avons rencontré le réalisateur Nam Dong-hyub et l’acteur Lee Hee-joon !

Nam Dong-hyub, il s’agit de votre premier long métrage en tant que réalisateur et scénariste. D’où vous est venue cette idée de faire un remake de Tucker et Dale fightent le Mal ?

Nam Dong-hyub : J’avais vu Tucker et Dale fightent le mal en 2011. La première fois que je l’ai vu, j’ai trouvé que le film était vraiment très drôle. C’était vraiment une des comédies qui m’avait le plus marquée à l’époque. Et bien sûr, à ce moment-là, je ne savais pas du tout que je voulais en faire un remake un jour.

C’est en 2018 que j’ai commencé à travailler pour Hive Media Corp en tant qu’assistant réalisateur. Et j’ai rencontré donc M. Kim Won-kuk, le producteur fondateur de Hive et je lui avais dit qu’en fait cela m’intéressait de faire mes débuts en tant que réalisateur. Je crois qu’il appréciait mon travail donc il m’a dit pourquoi pas. Il m’a demandé avec quelle oeuvre je comptais commencer le métier donc je lui ai montré plusieurs scénarios et je lui ai dit que Tucker et Dale pouvait être apprécié en remake en version coréenne, que ça pourrait peut-être séduire le public.

Dans la version originale du film, qui est canadien, il n’y a pas ce côté ésotérisme. Je me suis dit qu’ajouter cette touche pourrait plaire au public coréen, donc j’ai fait un synopsis de dix pages, on a travaillé ensemble, monsieur Kim connaissait mes goûts, il aime aussi la comédie, il a vu un potentiel dans ce projet. C’est donc en 2018 qu’on a commencé à parler de remake.

Habituellement, ce sont plutôt les États-Unis qui font des remakes de films étrangers, est-ce qu’on vous a laissé une totale liberté pour l’écriture du scénario ?

Nam Dong-hyub : Il n’y a eu aucune intervention dans l’adaptation. D’ailleurs, le film original ne vient pas vraiment d’une major américaine. Je crois savoir que pour l’achat des droits ça avait été un peu compliqué pour nous, car c’était très difficile d’entrer en contact avec les ayant-droits. Je crois qu’il y avait eu trois personnes : le réalisateur, le producteur délégué et une autre personne de la production. Ça a mis beaucoup de temps pour pouvoir contacter ces trois personnes, mais une fois que c’était fait et que l’on avait acheté ces droits, il n’y a eu aucune interférence de leur part. J’ai pu déployer ma créativité comme je le voulais, adapter librement ce film et ajouter cette fameuse touche d’ésotérisme.

Lee Hee-joon, entre votre personnage dans la série A Killer Paradox et votre rôle dans Handsome Guys, on peut dire que vous aimez beaucoup vous métamorphoser ! Qu’est-ce qui vous a donné envie dans ce rôle et avez-vous pu ajouter une touche à votre personnage ?

Lee Hee-joon : En général, j’aime bien observer pour préparer mes rôles. Quand j’ai reçu le scénario, j’ai tout de suite essayé de penser à ce qui pouvait m’inspirer pour ce rôle-là. Dans ma ville natale, j’ai quelqu’un qui ressemble un peu à ce personnage. J’ai commencé à beaucoup penser à lui et à ajouter quelques éléments de mon imagination pour combler le personnage. Bien évidemment, mon ami ne sait pas que c’est de lui que je me suis inspiré ! (rires)

Dans cette version, les deux personnages principaux ont quelque chose de beaucoup plus menaçant dans leur apparence. Y avait-il une préparation particulière du duo ? Était-il « séparé » du groupe de jeunes auquel il fait face sur le tournage ? 

Lee Hee-joon : On a vraiment essayé de rendre nos deux personnages les plus moches possible. C’était vraiment l’idée, qu’ils soient les plus affreux possible. Avec Lee Sung-min, nous avons vingt ans d’expérience dans la comédie et le théâtre. On se faisait mutuellement confiance et l’alchimie a été très bonne. On a passé un moment très agréable à jouer ensemble. Même pour l’actrice Gong Seung-yeon, qui joue le rôle de Mi-na. En Corée, il y a une sorte de hiérarchie concernant les âges, donc elle aurait pu être intimidée ou gênée de jouer avec nous parce qu’on est quand même beaucoup plus âgés qu’elle et avec beaucoup plus d’expérience, mais finalement il y a eu une alchimie tous les trois qui fait qu’on s’est bien amusés.

C’est donc un peu tout le contraire de ce qui peut se passer dans le film, qui a une dimension sociale très marquée entre les préjugés qu’on a les uns sur les autres ou la question du harcèlement. Dans la mise en scène, on comprend tout de suite quels sont les groupes, qui sont les uns contre les autres… 

Nam Dong-hyub : Merci beaucoup ! Pour en revenir à la question concernant la séparation entre les étudiants et les protagonistes dans le film, effectivement avant la fin du film, le tournage s’était effectué de façon un peu plus isolée. Je disais à ces jeunes qu’il fallait bien qu’ils aient en tête qu’il s’agissait d’un thriller horrifique et pas d’une comédie, parce qu’ils avaient plutôt tendance au départ à surjouer. C’est normal : ils sont jeunes, ils débutent et ils débordent d’énergie ! Donc je leur avais dit « oui mais n’oubliez pas que vous faites quand même face à un serial killer, selon vos personnages ! ».  Pour nos deux acteurs principaux, il va sans dire qu’ils arrivaient tous deux à s’adapter, je n’avais même pas besoin de les diriger vu leur niveau et leurs expériences passées.

Pour en revenir à cette fameuse malédiction et sa chèvre démoniaque, d’où vous est venue cette idée ? Et d’ailleurs, quels sont les films qui vous font peur ? 

Nam Dong-hyub : La chèvre est un peu cliché dans les films d’horreur, c’est un animal qu’on voit assez souvent. En Corée, on voit beaucoup de chèvres noires quand on va à la campagne. Vu que c’est un animal qu’on voit fréquemment dans le genre, à un moment donné j’ai pensé à remplacer cet animal par un autre animal sauvage qu’on voit en Corée comme un lapin, un sanglier ou un daim coréen. Et je me suis dit que comme Handsome Guys était déjà un film assez atypique, qu’il ne fallait pas ajouter des choses qui pourraient peut-être désarçonner le spectateur. J’avais peur qu’il y ait une sorte d’appréhension de leur part. Je me suis dit qu’on allait garder cette figure de la chèvre. C’est vrai que ce qu’on appelle ici l’esprit démoniaque, ou « le Mal », c’est plutôt une figure occidentale. Pour les Coréens, on est habitués à des sortes d’esprits plutôt que de démons.

Dans Handsome Guys, vous pouvez voir un hommage à Evil Dead que j’aime beaucoup. Mais pour moi c’est beaucoup plus un film comique. S’il y a un film qui m’a vraiment fait peur quand j’étais plus jeune, c’était La Malédiction. À l’époque, je me rappelle qu’avec mes camarades on cherchait qui avait le chiffre 666 sur le crâne. D’ailleurs, on peut voir une plaque d’immatriculation dans l’ouverture du film où figure le chiffre 666, qui est un petit clin d’œil à ce film !

Lee Hee-joon : Récemment, j’ai été surtout marqué par The Conjuring !

Le FFCP est le deuxième festival en France à programmer votre film, vous êtes restés le voir avec le public lors de la cérémonie d’ouverture, quel a été votre ressenti ?

Lee Hee-joon : Si je peux me permettre, moi aussi j’aimerais dire ce que j’ai ressenti lors de cette cérémonie d’ouverture. J’ai vu le film plus d’une trentaine de fois jusqu’ici, mais c’est vrai que cette fois-ci, j’ai ressenti un énorme respect envers le réalisateur car il y a un vrai sens du montage. Sur certaines scènes qui commencent à s’étirer, il arrive à enchaîner de façon assez ingénieuse, sans vouloir expliquer encore plus le contexte. Il a vraiment le sens du rythme. Bien sûr, les réactions du public français étaient un peu différentes de celles du public coréen et c’est d’autant plus intéressant. J’ai pris beaucoup de plaisir à partager le film avec le public français.

Nam Dong-hyub : Le film a déjà été sélectionné dans beaucoup de festivals et projeté dans plusieurs pays, mais je n’ai été physiquement présent qu’au Festival de SITGES en Espagne, au Festival du film coréen à Ottawa, au Canada, et là c’est la troisième fois pour le Festival du film coréen à Paris. Le film a toujours été apprécié partout où j’allais, mais à Paris j’ai vraiment vécu une réaction explosive. Je me demandais d’ailleurs pourquoi, et on m’a dit que le public était composé à deux tiers de personnes qui habitent à Paris ou les alentours, et d’un tiers de Coréens qui vivent à Paris. Donc 70/80% de la salle partageaient les mêmes codes humoristiques, et 20% d’autres codes. Ce qui fait que c’était assez marrant car pour certaines scènes, c’était surtout les Français qui riaient, et d’autres où c’était surtout les Coréens qui riaient. Je pense que c’est vraiment ça la force de la comédie, surtout quand on est en salle et qu’on est ensemble, car le rire est contagieux. Ça m’a vraiment beaucoup touché, j’étais très ému et heureux de partager le film avec le public. On a vu plusieurs fois le film ensemble avec M. Lee, mais je crois qu’il a vraiment pris son pied pendant cette cérémonie d’ouverture alors que la dernière fois qu’il avait le film, c’était il y a une ou deux semaines !

Enfin, Lee Hee-joon, est-ce que c’est toujours aussi intense quand vous faites la vaisselle ? 

Lee Hee-joon : En vrai ? (rires) En vrai, j’ai un esprit très patriarcal… Non, en vrai quand je fais la vaisselle, quand ma femme regarde le résultat une fois que j’ai fini, elle n’est pas contente et je me fais disputer, donc je ne fais pas la vaisselle ! (rires)

Interview réalisée le jeudi 31 octobre 2024. Propos recueillis par Gabin Fontaine et traduits par Kim Ye-jin. Merci à Cédric Callier et l’équipe du FFCP pour l’organisation de cet entretien. Photo de l’article prise par l’équipe du FFCP. 

Handsome Guys, un film de Nam Dong-hyub, avec Lee Sung-min, Lee Hee-joon, Gong Seung-yeon… Film d’ouverture de la 19e édition du Festival du Film Coréen à Paris.

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