Prisoners, l’innocence disparue

Dans la banlieue de Boston, deux fillettes de 6 ans, Anna et Joy, ont disparu. Le détective Loki privilégie la thèse du kidnapping suite au témoignage de Keller, le père d’Anna. Le suspect numéro 1 est rapidement arrêté mais est relâché quelques jours plus tard faute de preuve, entraînant la fureur de Keller. Aveuglé par sa douleur, le père dévasté se lance alors dans une course contre la montre pour retrouver les enfants disparus.

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« J’ai rarement vu un film à ce point terrifiant qu’il se range aux côtés de Psychose ou de Seven. Prisoners est aussi puissant que ça. C’est l’un des plus effrayants jamais tournés. »

Cet avis dithyrambique n’émane pas d’un blogueur ciné facilement impressionnable ou d’un journaliste prêt à servir la soupe à Denis Villeneuve. Il s’agit d’un tweet signé William Friedkin. Ces quelques 140 signes valent toutes les meilleures critiques du monde lorsque l’on sait ce que le polar, le thriller et le cinéma horrifique doivent au réalisateur de L’Exorciste.

Il serait donc tentant de vous dire de courir découvrir Prisoners en salle sans vous poser de question. D’autant plus qu’il vaut mieux en savoir le moins possible pour se laisser happer par l’atmosphère suffocante qui n’offre aucun instant de relâche pendant deux heures et demie.

Tous des salauds potentiels

Disons que Prisoners est un film entièrement travaillé par la monstruosité. Une monstruosité qui se répand comme un virus face auquel aucune âme n’est immunisée. Ce thriller brouille avec application les frontières entre coupables et victimes, faisant de chaque protagoniste un salaud potentiel, rejetant tout manichéisme. La moralité et la culpabilité des personnages est sans cesse remise en cause au fur et à mesure que l’enquête avance.

Imprévisible

Le spectateur, qui voit sa compassion ou sa répulsion à l’égard des protagonistes constamment bousculées, est plongé dans un abîme de doutes. Cet inconfort est salvateur à une époque où les jugements à l’emporte-pièce sont légion et où une page Facebook de soutien à un bijoutier « qui ne faisait que son travail » recueille plus d’1,5 millions de « J’aime ».

Certains argueront que Prisoners pâtit d’un twist too much, qui nuirait à sa pertinence et annihilerait la force de ce qui a précédé. Que penser alors des retournements de situations qui concluent Psychose et Seven, auxquels Friedkin le compare ? Il vaut mieux souligner que ce film, qui n’est à aucun moment prévisible, réussit à porter l’apparent thriller divertissant vers des hauteurs de tragédie désenchantée. Si vous ne faites pas confiance à Cinématraque, osez au moins vous fiez à l’avis de Billy Friedkin.

Prisoners, Denis Villeneuve, avec Hugh Jackman, Jake Gyllenhaal, Viola Davis, États-Unis, 2h33.

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2 thoughts on “Prisoners, l’innocence disparue

    1. Qu’entends-tu par là ? Parce que, sur le plan moral, je n’ai, par exemple, trouvé aucune trace de complaisance envers les actes de Hugh Jackman, présenté comme un survivaliste, ayant une foi vive mais oubliant le « délivre nous de tout mal » du « Notre père » ouvrant le film. Idem sur le plan politique : le film ne tient absolument pas un discours favorable à la loi du Talion.

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