Révélée avec le magnifique (et particulièrement d’actualité en France) Plan 75, Chie Hayakawa était très attendue (par nous en tout cas) depuis l’annonce de sa sélection en compétition à Cannes. Nous en savions très peu sur Renoir hormis qu’il ne s’agissait pas d’un biopic sur un peintre (ni sur un réalisateur).
Nous en savons désormais un peu plus, vu que nous avons vu le film. Renoir, c’est l’histoire d’une petite fille dans les années 80. On pourrait alors se dire que Chie Hayakawa effectue une rupture thématique après avoir filmé une vieille femme confrontée à sa propre mort dans Plan 75. Que nenni ! La mort est également omniprésente dans Renoir. Principalement parce que le père de la jeune fille est mourant, en phase terminale d’un cancer. Le film commence alors que la mère, visiblement à bout, décide d’envoyer le père à l’hôpital pour qu’il y finisse ses jours. Mais autour de cet élément du récit, la mort semble contaminer de manière presque diffuse tout le reste. Des rêves de la jeune fille aux informations diffusées à la télé, le mort guette et donne au long-métrage un aspect perpétuellement crépusculaire.
La télépathie pour égayer les trajets en train ne m’a pas convaincu
Mais Renoir est également plein de vitalité notamment grâce à Fuki, interprétée par la jeune actrice Yui Suzuki dont le regard illumine régulièrement l’écran. Très énigmatique, la jeune fille restera toujours à distance du spectateur par ses choix et ses réactions imprévisibles. Entre frivolité et gravité, Fuki essaye de vivre dans cet environnement si lourd. Sa relation avec son père est captée à l’occasion de moments fugaces sans jamais que le long-métrage ne cherche à décortiquer frontalement leur lien. Ce n’est pas pour rien que Renoir (le peintre) est invoqué par Hayakawa. Car elle aussi, à la manière des impressionnistes, ne peint que par petites touches. Et ce n’est que de manière diffuse que le film fait émerger les émotions fortes qu’il porte en lui.
Quelques rares moments saillants cristallisent parfois l’atmosphère funeste du film. Une scène glaçante chez un jeune étudiant notamment fait monter brutalement en tension le film sans aucun artifice de mise en scène. Mais ce ne sont pas ces moments qui constituent le cœur du film qu’il faut chercher dans ses petits riens et ses instants perdus.
C’est aussi la faiblesse du film qui finit par nous perdre dans son rythme trop distendu. Si l’on comprend la recherche de Chie Hayakawa d’une vérité de l’émotion cachée dans l’apparent anecdotique, on a du mal à y souscrire tout au long du film. Ce qui fonctionnait parfaitement dans Plan 75 qui partait d’un postulat de base très fort, n’a pas la même force dans ce film qui manque d’un centre de gravité dans son récit. Et ce n’est pas mes voisins de séance qui ont vu la majorité du film les yeux fermés qui me contrediront.
Hayakawa prouve avec Renoir qu’elle a une identité de cinéaste forte mais son film ne réussit à nous emporter totalement. Restent de très beaux coups de peinture et de jolies promesses.
Renoir, un film de Chie Hayakawa avec Yui Suzuki, Lily Franky, Hikari Ishida, sortie en France le 17 septembre 2025