La Croisade : Yes We Cannes sauver la planète

Parmi les curiosités les plus surprenantes de ce festival de Cannes 2021 surchargé en films, on trouve une sélection spéciale « Climat ». Quelques longs-métrages de fiction et documentaires qui accompagnent une démarche entamée par la direction du festival pour limiter l’empreinte carbone de leurs actions.

En effet le grand rendez-vous du glamour et du business du septième art est bien connu pour ses excès et son exubérance, et c’est tout à l’honneur de la bande à Frémeaux que d’avoir souhaité faire un pas vers un monde plus écolo. Tout en ayant conscience qu’à l’heure où des villes sont totalement rasées par des vagues de chaleur insensées au Canada et où l’océan prend feu, « faire un pas vers un monde plus écolo », c’est un peu comme essayer de repeindre la muraille de Chine avec un stylo Bic : c’est largement inutile et un peu ridicule. Comme cette « caution environnement prélevée chez tous les festivaliers » (encore que, je ne suis pas sûr qu’Adam Driver ait payé les vingt euros de sa poche comme nous…).

Mais si l’on croit au pouvoir des images, on peut encore espérer que les films puissent avoir un impact sur le réel. C’est ainsi que l’on retrouve le réalisateur et acteur Louis Garrel dans cette sélection climat pour un film tout aussi maladroit que la position du gouvernement sur l’environnement, mais pas moins intéressant toutefois.

Troisième réalisation pour le fils de Philippe, La Croisade raconte l’histoire d’un jeune ado parisien qui révèle à ses parents bien bourgeois sa mère qu’il a vendu leurs effets personnels les plus précieux pour « un projet ». Lorsque les parents (Louis Garrel et Laetitia Casta) découvrent que leur fils a fait ça pour financer un immense projet de sauvetage de la planète coordonné entre collégiens du monde entier, le film bascule totalement dans un délire qu’on a jamais vu à ce jour au cinéma.

Le projet serait né apparemment il y a quelques années, lorsque Louis Garrel a constaté l’implication indéniable de la jeunesse dans la lutte pour le climat. Il a donc décidé de mettre en scène la conscience politique de la génération Z en opposition avec celle des trentenaires, sa propre génération de bourgeois égoïstes et nombrilistes – dans laquelle il semble s’inscrire volontiers.

Le résultat, en plus d’être foncièrement drôle, est surtout déroutant. Le ton adopté, trop léger, les intrigues amoureuses à la Je t’aime moi non plus que Garrel n’a pas pu s’empêcher d’ajouter dans son film, et l’absurdité totale du concept se mélangent très mal. Difficile de voir une réussite dans ce projet co-signé par le regretté Jean-Claude Carrière, et pourtant il serait malhonnête de retirer au film sa tentative somme toute audacieuse. Puisque le public des films de Louis Garrel ressemble à Louis Garrel, on peut espérer qu’ils prendront au sérieux la comédie, et qu’ils se sentiront blessés dans leur orgueil face à ce portrait de leur population nauséabonde. En tout cas c’est tout le bien que l’on souhaite au film, qui dans sa dernière séquence semble suggérer que les efforts des plus jeunes pourraient bien entraîner tout le monde vers un monde meilleur. Parce que si l’on doit repeindre la Muraille au stylo Bic, autant être nombreux.

La croisade, un film de Louis Garrel co-écrit avec Jean-Claude Carrière, avec Laetita Casta et Louis Garrel.

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