[Annecy 2021] Petit Moutard : des seins animés

C’est toujours pareil. À chaque festival, on espère tomber sur la perle rare. Le truc dingue qui va nous retourner la tête. Car souvent on ne sait pas du tout à quoi s’attendre en s’asseyant dans la salle (ou en allumant son pc, quand on est en ligne parce que la vie c’est de la merde)… Et on se dit qu’à tout moment, on peut tomber sur un truc scandaleux.

Nous ne parlons pas en effet de chef d’œuvre ici mais d’accidents industriels. De films dont l’existence même dépasse l’entendement. Comme si leur création avait été telle celle de Jésus : immaculée, sans personne à blâmer. Il y a quelques années nous avions eu Animal Crackers, qui a posé les jalons indépassables du genre à Annecy. A chaque édition, on se prend à en reparler avec émotion… C’est un peu notre The Last Face à nous.

L’espace d’un instant, Petit Moutard nous a fait croire qu’il rentrerait dans cette catégorie. Dès les premières images d’un bébé « vallée de l’étrange » affreusement laid et terrifiant expulsé du ventre de sa mère avec violence, on sentait le potentiel. Et quand juste après on le voit se jeter sur un sein pour le téter, on se dit que ça y est, on est lancés. Dans les séquences qui suivent, le bébé est devenu ado et obsédé par l’opulence d’une femme de son village, la dessine de façon lubrique. Jackpot, on est dans un wtf absolu, Laura Mulver va faire des conférences sur le male gaze avec ce film obligé, on nage en plein délire.

Malheureusement le film devient beaucoup plus conventionnel par la suite, et par la même rompt sa promesse de nanar ambulant. Il parvient même à être touchant par moments, malgré son axe masculin pas assez maîtrisé pour être intéressant, et surprend quand le puritanisme de la petite bourgade se retrouve confronté à un discours sur les peuples tziganes et les nazis. Il faut dire que le film s’inspire en fait de la vie du caricaturiste Manfred Deix, que l’on va faire semblant de connaître pour paraître intelligent (on vous autorise à faire pareil). Mais l’animation très sommaire couplée à un film trop daté (le côté irrévérencieux à la Mad Magazine, qui se ressent jusque dans le design du héros) ne parvient pas à faire mouche.

Heureusement la séquence de fin retrouve un peu de l’absurdité totale du début avec une séquence d’explosion de caca et de pluie de caca. C’est toujours ça de pris, on pourra toujours raconter aux potes qu’on a vu ça en festival… Et c’est aussi pour ça qu’on s’y rend.

Petit Moutard, de Marcus H. Rossenmuller et Santiago Lopez Jover.

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