Entretien avec Takashi Miike, de retour avec First Love

Cette année, à Cannes, nous avons eu le plaisir de rencontrer un de nos cinéastes fétiches: Takashi Miike, auteur entre autre des Dead or Alive, Itchii The Killer ou encore Audition. Cinéaste vénéré par Quentin Tarantino ou Gaspar Noé, c’est aussi l’un des cinéastes les plus prolifiques actuellement. On profite de la projection de First Love à l’Etrange Festival pour vous offrir cette interview cannoise.

Vous multipliez les tournages et les projets et ce n’est pas toujours très simple de suivre votre actualité même si, comme nous, beaucoup suivent votre carrière avec assiduité. Nous avions, par exemple, été très surpris d’apprendre l’existence de First Love, qui semble avoir été fait sous une brusque impulsion.

Je voulais faire une histoire d’amour à ma façon. Une histoire d’amour normale, c’est quelque chose à vivre. Mais au cinéma, je voulais faire autre chose: une histoire d’amour chez des abrutis, c’est à dire les Yakuza – qui étymologiquement signifie “bon à rien”. Ce n’est pas le but des Yakuza d’avoir des histoires d’amour; et d’ailleurs c’est totalement inattendu, ils meurent tous à la fin du film. Mais je trouve l’idée intéressante. Le scénario a été écrit très rapidement et la préparation du tournage à été très courte. J’ai surtout eu la chance que les acteurs soient tous disponibles au même moment. Du coup, on s’est tous bien amusés.

Face à First Love, on a l’impression de faire face à un film somme. Mêlant autant l’aspect décomplexé, faussement dilettante et punk d’une partie de votre œuvre, et celui plus classique et visuellement rigoureux. Pensez-vous être à un moment charnière de votre carrière ?

Mon scénariste, est à la fois un ami et un collaborateur de longue date. C’est un auteur talentueux mais lorsqu’il adapte un livre pour le cinéma, il change tellement d’éléments par rapport à l’œuvre d’origine que l’écrivain a tendance à se plaindre. Il y a parfois des problèmes, il a tendance à avoir du mal à faire des compromis. Du coup il m’arrive de trouver des moyens de régler ces problèmes par rapport au scénario. Ce n’est pas une intention de ma part de chercher à faire un film somme, qui symbolise l’aboutissement de mon œuvre. Mais peut être que mon scénariste y a pensé et a travaillé sur ça. Ou peut être qu’il a écrit un scénario qui pouvait me permettre de travailler librement. Il y a aussi le fait que l’on est tous les deux plus très jeunes et nous ne pouvons plus tourner un film avec un emploi du temps chargé. Surtout lui. Du coup, nous voulions faire un film surprenant, un nouveau coup.

La séquence qui nous a le plus marqué dans votre dernier film, c’est une séquence en animation, c’est une véritable surprise, c’est nouveau dans votre travail. Pourquoi avoir choisi de tourner cette séquence en animation ?

Il y a de moins en moins de cascadeurs au Japon, surtout des jeunes. Il y en a encore, mais plutôt âgés, et j’avais peur qu’il se fassent mal physiquement. Il y avait aussi des questions de budget. Les scènes d’actions coûtent cher, et beaucoup de producteurs refusent ces scènes dès la lecture du scénario. Du coup, beaucoup de réalisateurs finissent par renoncer aux scènes d’actions. Il y a cette tendance aujourd’hui au Japon, selon laquelle même les scénaristes se contraignent à ne plus écrire des scènes spectaculaires. Moi je suis contre cette tendance. Du coup, cette séquence est ma réponse à cette tendance. Faire une séquence d’animation, attention, ce n’est pas bon marché. Je voulais simplement dire qu’on a le droit d’offrir ce genre de moments.

First Love/Hatsukoi de Takashi Miike, avec Masataka Kubota, Nao Ohmori, Shôta Sometani, Sakurako Konishi, Jun Murakami… Projeté lors de l’Etrange Festival 2019, aucune date de sortie officielle pour l’instant.

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