Newimages 2019 au Forum des images

Malgré une période très chargée en vie – ce qui, ne nous plaignons pas, n’est pas la mort – nous prenons tout de même le temps cette semaine de nous rendre au Forum des images, pour jeter un œil à l’actualité des créations en réalité virtuelle. Si vous vous réveillez soudain après avoir été dans le coma pendant trois ans, déjà : votre premier réflexe est de lire Cinématraque ? Après trois ans dans le coma ? Vous êtes automatiquement la meilleure personne de tout notre lectorat. Mais surtout, vous devez savoir que cela fait un moment que Cinématraque s’intéresse à cette technologie, ce médium hybride qui dépasse les notions de cinéma et de jeu vidéo par une nouvelle pensée du cadre, du son et de l’interactivité.

Nous étions déjà au Newimages Festival l’an dernier. Nous étions trois années de suite aux présentations VR du festival d’Annecy. Cette année, nous retournons à Newimages pour un focus plus centré sur quelques œuvres de la compétition VR ; néanmoins le festival ne se limite pas du tout à cela. Des films sont diffusés sous la Canopée des Halles, des conférences sur les nouveaux médias ont lieu tous les jours du 19 au 23 juin, et même des concerts… On voit les choses en grand. Mais pour l’heure, parlons créations VR.

Plutôt que de parler de toutes les œuvres que nous avons pu voir, nous avons décidé d’en retenir trois qui ont particulièrement capté notre attention. Le fait est que ce domaine est encore en pleine quête identitaire, et tous les projets ne se valent pas… On trouve encore en sélection des œuvres qui peinent à penser l’espace et le son pour une narration fluide, qui perdent le spectateur en insérant des sous-titres ici ou là. Mais heureusement, on trouve surtout de très belles choses – la preuve ci-dessous.

Gloomy Eyes Part. 1: The First Light, Jorge Tereso et Fernando Maldonado

Récompensé la semaine dernière à Annecy dans la compétition VR, ce film d’animation 3D raconte un monde où le soleil a cessé de vouloir se lever, et où les zombies ont envahi le monde. Gloomy est un zombie, Nena est humaine… Et les deux vont tomber amoureux.

« On baise ? »

Ce qui frappe d’entrée de jeu, c’est le choix de point de vue: là où on est habitués à être plongés dans des univers immenses dans la réalité virtuelle, Gloomy Eyes fait le choix de nous montrer des univers en miniature; comme si nous étions des créateurs de maquettes, ou des réalisateurs de stop motion. Ainsi l’on a plus l’impression d’être face à du théâtre de marionnettes, ou même de l’opéra dans des décors macabrement sublimes. Malgré la distance de la caméra, nous sommes sans cesse en mouvement pour parvenir à suivre les personnages qui courent de décors oniriques
en décors gothiques et effrayants.

Plus que son histoire, d’ailleurs narrée par Colin – Homard m’a tuer – Farrell, plus que son univers, c’est cette distance (quelque chose que l’on retrouve dans Arden’s Wake aussi) physique, littérale qui fait de Gloomy Eyes une œuvre à part. Là où souvent l’immersion joue sur un vertige, le film en prend le contre-pied total ; et voir ces petits êtres face à nous a donc quelque chose d’infiniment touchant.

Wolves In The Walls : It’s All Over
(version complète), Neil Gaiman par Pete Billington

Nous avions vu la première partie de ce film interactif l’an dernier dans ce même festival. Cette fois, c’est une œuvre complète en animation 3D que nous découvrons; et la réussite est totale. Lucy a 8 ans et est persuadée que des loups rodent dans les murs de sa maison. Elle en parle à la seule personne qui accepte de l’écouter: son ami imaginaire et spectateur du film VR.

On a l’œil chez Cinématraque pour parler bon cinéma.

L’interactivité de ce film est très limitée, et heureusement ; elle participe uniquement à l’immersion, de la même manière qu’un conteur peut impliquer son auditoire dans son histoire. Les mots choisis sont logiques : il s’agit bel et bien d’un conte. Une histoire avec une touche de magie et une touche d’horreur, puisque comme le répètent les membres de la famille de Lucy : « quand les loups sortent des murs, tout est fini ». Mais que peut bien vouloir dire cette phrase ? La réponse est surprenante, car littérale.

Et si le film est déjà très bon dans ses péripéties, sa pensée du cadre, sa maîtrise du son et sa poésie ambiante, c’est sa conclusion qui en fait une véritable œuvre d’exception. Car oui, les loups finissent bien par sortir des murs… Et le monde devient fou à ce moment précis. L’occasion pour Fable Studio, qui produit ce court métrage, de montrer que l’on peut tout à fait penser des éléments de montage dans une création en réalité virtuelle, et donc se rapprocher de ce qui est constitutif au cinéma. Gros coup de coeur de cette année.

A Fisherman’s Tale, Balthazar Auxietre et Alexis Moroz

Nous allons tricher un peu pour terminer et parler jeu vidéo. Ceux qui souhaitent se plaindre n’ont qu’à écrire à @RenaudActual sur Twitter, il se fera un plaisir d’écouter vos palabres mécontentes.

Comme son titre l’indique, ce jeu est l’histoire d’un pêcheur qui vit dans un phare et dans sa routine. Chaque jour, il se brosse les dents, met du bois dans la chaudière, astique son coquillage préféré, ouvre la fenêtre puis travaille sur sa maquette : une réplique exacte de sa maison, son phare, et même de sa personne. Un jour, il se réveille et se sent plutôt bizarre… Il ouvre la fenêtre et découvre une plus grande version de lui-même dehors. Et quand il soulève le toit de sa maison miniature… Il est là aussi. Le vertige est fabuleux.

Dès lors, il s’agit d’un escape game très malin, où il faut savoir interagir entre les différentes dimensions : impossible de déplacer une grosse ancre dans la maison, mais la déplacer dans la miniature en revanche… Les contrôles ne sont pas hyper intuitifs, mais cela reste hyper grisant. D’autant plus que les capteurs nous permettent de nous déplacer physiquement dans un espace virtuel, ce qui nous donne envie de hurler ON VIT DANS LE FUTUR en permanence. Nous ajouterons enfin que beaucoup de joueurs se sont retrouvés coincés au moment de la casquette, et que nous avons réussi à la trouver. Si jamais vous voulez une soluce, il faudra aller écrire à @RenaudActual sur Twitter. Mais attention, si vous lui avez déjà écrit pour vous plaindre que Cinématraque parle de jeu vidéo… Il risque de ne pas vouloir vous aider.

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