Les Particules très secondaires

Même après que le meilleur ami du héros ait disparu, on se demande toujours quand est-ce que Les Particules va commencer. Le film s’achève avec l’une des lignes de dialogues les plus mal jouées de ces 1h38, mais la perspective de voir le générique défiler enfin nous ôte presque toute envie de nous plaindre. A ce stade, le décor est planté. Pourtant, le synopsis nous promettait mieux : P.A. (ne l’appelez surtout pas Pierre-André) habite à la frontière franco-suisse, sur la commune qui abrite le LHC – l’accélérateur de particules le plus puissant du monde, qui provoque des collisions de protons, afin de recréer les conditions d’énergie du big bang et de détecter des particules encore inconnues.

L’ambition annoncée du réalisateur était de faire du LHC l’acteur principal du film, à mi-chemin entre Big Brother et Hal, et de faire se rencontrer sa volonté et les péripéties de P.A. et sa bande, lors de leur dernière année de lycée. On retrouvait l’expérience de documentariste de Blaise Harrison dans son choix de n’engager que des acteurs non-professionnels, résidant sur place, et bel et bien en terminale, afin qu’ils jouent leur propre rôle. Manque de chance, ce manque d’expérience a grandement contribué à faire couler son projet. (Le naufrage reste relatif, puisque le film a été sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs, mais… cet exploit reste encore inexpliqué)

Le LHC, l’accélérateur de particules le plus puissant du monde

En pratique, P.A ressemble à une sorte d’Alex Turner période Humbug, mais amorphe et lymphatique. (A la réflexion, la sélection du film à Cannes s’explique peut-être par son inscription dans le fil « zombie » de ce 72e festival). Entre des séquences de soirées qui nous rappellent les heures les plus sombres de notre adolescence, de bavardages en cours et de drague très gênante, on comprend la volonté de Blaise Harrison de coller au plus près du quotidien de ces lycéens. Les adultes sont même exclus de l’intrigue au point que certains plans les coupent carrément au niveau des épaules. De temps en temps, une coupure de courant ou un plan d’extérieur nocturne et légèrement mystérieux sont censés indiquer le basculement du monde sous le coup de cette activité particulaire obscure – comment ? je n’ai toujours pas compris. Au bout d’une heure de film, on se sent déjà héroïque.

Les Particules est une vraie déception, tant on sent que son réalisateur aurait pu mettre en forme quelque chose d’intéressant. Malheureusement, la réussite d’un film de fiction – contrairement au documentaire – repose en trop grande partie sur la performance de ses acteurs pour qu’on prenne le risque de s’appuyer sur un casting entièrement bancal. Ajoutez à cela la double absence d’une ligne directrice ainsi que d’un réel rythme scénaristique, et on en est presque à piquer du nez. Créer un film qui vise à distiller le mystère, ce n’est pas mettre bout à bout des événements faussement énigmatiques mais qui ne piquent même pas l’intérêt, tellement on s’ennuie. Finalement, le vrai souci du film, c’est qu’on en ressort en se disant: plutôt que celles du LHC, ce sont les voies de Blaise Harrison qui sont impénétrables…

Moi face à ce film

Les Particules de Blaise Harrison, avec Thomas Daloz, Néa Lüders, Salvatore Ferro, Léo Coullfort et Nicolas Marcant. En salles le 5 juin 2019.

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