American Nightmare : Les Origines, le pire reste à venir ?

Avec The First Purge (Les Origines) réalisé par Gerard McMurray, la série de films The Purge (American Nightmare chez nous) de James DeMonaco, produit par Jason Blum, radicalise son propos politique en abandonnant Los Angeles pour la capitale du crime : New York. Agissant comme un prequel, James DeMonaco et Gerard McMurray nous expliquent comment nous en sommes venu.e.s à un monde où les États-Unis d’Amérique autorisent douze heures par an à un déchaînement de violences non réprimées. Un déchaînement intitulé la purge par ses participant.e.s (sorte de « deux minutes de haine » orwellienne).

Pour réduire le taux de criminalité en dessous des 1 % sur le sol américain, le nouvellement élu parti des Nouveaux Pères Fondateurs de l’Amérique (NFFA : New Founding Fathers of America) décide de mettre en place, sur les bases d’une théorie sociologique, une nuit où tout est permis : ou comment la violence serait-elle rédemptrice et permettrait une sorte de catharsis. Afin de voir si l’expérience serait concluante, le site new-yorkais de Staten Island est choisi. Sorte de microcosme du pays avec des communautés fortement stigmatisées présentes (principalement la population noire) et un taux de pauvreté assez conséquent, la zone est aussi facilement isolable en bloquant les quatre ponts y donnant accès. Du pain bénit pour les Nouveaux Pères Fondateurs.

Victimes de la crise, marqué.e.s par la marginalité, la pauvreté et la précarité, les habitant.e.s de « l’île » se laissent, pour certain.e.s, tenté.e.s par l’expérience sociale. Le plan du pouvoir est simple récompenser financièrement celles et ceux qui ne quitteront pas leur habitation. Mieux encore, celles et ceux qui participeront activement à la purge se verront d’autant plus récompensé.e.s. Le but est d’y installer le chaos et justifier une purge nationale l’année suivant l’épisode de Staten Island. Laisser s’entretuer les pauvres et faire du profit : c’est leur projet !

Plus qu’une « violence révolutionnaire » comme évoquée par Marx, Engels ou Benjamin, on assiste à une violence entre opprimé.e.s

Ainsi, plus qu’une « violence révolutionnaire » comme évoquée par Marx, Engels ou Benjamin, on assiste à une violence entre opprimé.e.s qui se détruisent et ainsi réduisent leurs forces pour détruire l’État et toute forme de pouvoirs et d’oppressions. Avec sa purge, l’État américain maintient sa violence structurelle et symbolique sur les plus faibles. Pire encore, avec la création d’une milice, il tente de pousser à la violence ces individus qui sont font une fête au grand désarroi des Nouveaux Pères Fondateurs. Là réside certainement une des plus belles scènes du film à la fois cinématographiquement, que dans son suspense ou de ce qu’elle dit des êtres humains découvrant plus de libertés et une disparition de l’État et sa violence.

Le répit est de courte durée, le gouvernement n’a rien à gagner d’une fête géante à Staten Island. La violence doit faire rage, embraser cette partie retranchée de New York. La crédibilité du pouvoir est en jeu. Dans ce contexte, fascistes et affilié.e.s KKK (Ku Klux Klan) sonnent la charge en s’en prenant évidemment aux noir.e.s, même les policiers sont de la partie : racisme, capitalisme et répression vont souvent de pairs, ils sont inévitablement le « bras droit de la bourgeoisie ». Alors, à l’instar des Black Panthers, une milice d’autodéfense est formée par Dimitri (Y’lan Noel) et son gang, afin de lutter contre la destruction de la communauté noire. Un moment jouissif où l’iconographie nazie se voit détruite par des personnages noir.e.s. On serait presque à se demander si American Nightmare : Les Origines ne va pas plus loin que le Black Panther de Ryan Coogler (2018) dans sa vision des minorités. Et pour cause, le film est en parfaite non-mixité, fait des blancs bourgeois les véritables ennemis, convoque explicitement l’épisode tragique de Ferguson (et tant d’autres récents) ainsi que le Black Lives Matter (« Nigga, we gon’ be alright ») ! Après Get Out (Jordan Peele, 2017), l’horreur semble être porte-parole de la communauté noire comme peut l’être le rap dans la musique !

La force de la série de James DeMonaco/Jason Blum n’a jamais été d’une grande puissance cinématographique, le cinéaste se limitant à une ode au cinéma de John Carpenter (cité une fois encore dans ce nouvel opus, à de nombreuses reprises, dont une habile promotion du prochain Halloween par David Gordon Green et produit par Jason Blum). Mais, sa véracité sociologique est tout à fait édifiante. Vous aurez été prévenu.e.s !

Ni peur, ni haine, c’est là notre victoire !

American Nightmare : Les Origines de Gerard McMurray, avec Y’lan Noel, Lex Scott Davis, Joivan Wade, Mugga, Patch Darragh et Marisa Tomei. 1 h 37. Actuellement en salles.

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