Nos intrépides aventures au Festival d’Annecy : Part Finale, Snif

Nous sommes samedi matin, et la ville d’Annecy a perdue de son effervescence. Bonlieu et le Pathé sont moins envahis, l’air est moins électrique, mais toujours aussi agréable. C’est le dernier jour, et déjà une grande partie des festivaliers est sur le départ. Le réveil est tardif, car la fête Pixar et les célébrations avec les ex-étudiants des Gobelins nous ont bien occupés toute la nuit… Mais il faut bien retourner travailler une dernière fois. Alors on se traîne hors du lit, et l’on traîne la patte hors de l’appartement… pour se retrouver face au lac et aux montagnes. Il y a quelque chose de magique à Annecy, une poésie flottante qui se balade au gré du vent ; c’est sans doute pour cela que le festival est si exceptionnel. Le plus beau au monde, pour beaucoup, et je vous avoue que je suis moi-même profondément conquis. C’est comme si cette ville avait été pensée pour l’animation, ce domaine d’enfants déguisés en adultes, qui en gardent toute l’insouciance, la naïveté, l’ouverture d’esprit. Sans une once de cruauté. Difficile de dire qu’Annecy est le plus beau festival du monde sans les avoir tous fait, mais je ne pense pas m’avancer beaucoup en le décrivant comme le plus doux.

C’est donc avec une certaine mélancolie que l’on attaque cette dernière journée tranquillement, d’un pas léger. On va d’abord rattraper Dans Un Recoin de Ce Monde, dont Lucas vous a déjà parlé lundi. La séance commence, et l’inénarrable générique du festival se lance… Sans son. Mais pas de problème ! Le public aguerri peut chanter les paroles comme dans un karaoké. Puis le projectionniste, décidément bien fatigué, lance le film en étant trop zoomé. Les sous-titres sont hors champ… La salle se plaint, mais de façon mignonne. Je ne sais pas s’il y a meilleure manière de décrire le public d’Annecy et l’ambiance bon enfant du festival. Même en cas de problème comme celui-ci, tout le monde rigole. Enfin, le projectionniste dézoome, et l’on peut visionner le film correctement. Superbe adaptation du manga, ce long métrage animé joue sur la force des vignettes et du temps qui passe, ainsi que sur son rapport au dessin dans l’image. Ici, l’animation est bien plus qu’un choix artistique, il en va de l’âme même de l’œuvre. On comprend que le cinéaste se soit battu pour réaliser le projet ainsi, alors que les droits pour une adaptation live avaient déjà été vendus.

Loving Vincent (Film en Compétition) : Citizen Van Gogh

Il en va de même avec le dernier film en compétition dont nous souhaitions vous parler: le fameux Loving Vincent. Nous avons là une prouesse remarquable où la rotoscopie est utilisée à des fins totalement justifiées, pour raconter une histoire en animant le style du pionnier de la peinture moderne. C’est donc absolument sublime, et cela au service d’une histoire assez inattendue: c’est une sorte d’enquête policière inspirée de tableaux et de la mort de Van Gogh. Le fils d’un ami du peintre, interprété par Douglas « les lèvres de feu » Booth, refuse de croire que Vincent s’est suicidé, et il part rencontrer tous ses proches, pour en apprendre sur la fin de sa vie. Le film est structuré à la Citizen Kane, ce qui est à la fois une force et une faiblesse, puisque cela schématise et encombre le récit d’un rythme un peu fastidieux. Heureusement, les performances sont riches et l’histoire prenante, puisqu’au final Loving Vincent préfère ne pas prendre parti sur les circonstances de la mort, et se concentrer sur ce qu’est la dépression. Il est impossible pour Douglas Booth — Armand Roulin de son nom dans le film — de comprendre et d’accepter que Vincent se soit donné la mort, alors que six semaines plus tôt il se disait dans une lettre être parfaitement heureux. La performance de Jerome Flynn (le Bronn de Game of Thrones) en docteur Gachet est très impressionnante sous les traits de l’animation, et apporte une richesse supplémentaire à une œuvre qui oscille entre mystère, poésie et déclaration d’amour. C’est du grand cinéma, et méritera probablement un cristal (j’écris ces mots quelques heures avant la remise des prix).

« le plus beau des festiveaux »

On espère voir nos favoris récompensés lors de la cérémonie, et une belle carrière à tous les films qui nous ont touchés durant cette semaine. On pense à A Silent Voice, Loving Vincent et Lou et l’île aux Sirènes, dont nous attendons beaucoup !

En patientant avant cette remise des prix finale, il ne me reste qu’à exprimer ma reconnaissance à Gaël Martin qui a fait un énorme boulot d’édition depuis Paris durant le festival. Et puis, je remercie mon camarade Lucas Guthmann qui a coécrit tous les comptes-rendus, mais m’a lâchement abandonné aujourd’hui. C’est le cœur gros d’émotions que je termine le dernier de ces comptes-rendus journaliers, avec l’espoir de revenir l’année prochaine et les suivantes. Que le monde du cinéma d’animation ne nous quitte jamais, quelle que soit la forme que cette relation prenne. Merci Annecy, tu es vraiment « le plus beau des festiveaux ». On se prépare maintenant à se miner la tronche à la soirée de clôture, façon Cinématraque !

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