Camping 3 : c’est la fin des vacances

En préambule, précisons que Camping, c’était lors de notre cycle Plaisir Coupable, le choix de l’auteur de cet article. Choix qui lui vaut chaque jour de nombreuses moqueries, de nombreux jets de légumes divers et (a)variés sur le coin de la gueule.
Cliquez ici pour relire son papier d’amour à Onteniente, dont encore aujourd’hui il ne « change aucune virgule »


J’avais noté la date depuis son annonce officielle. Elle était cochée dans mon esprit comme la promesse même plus inavouable d’un retour aux Flots Bleus avec Patrick, mon pote de tongs. Une échéance qui m’a permis de continuer à vivre ma life, avec des hauts et des bas, mais au moins une échéance claire, un but simple.

Les chemins de mon existence convergeaient donc en ce mercredi 29 juin sur le coup de 22h dans la salle 1 du MK2 Nation accompagné de mon intellectuelle de compagne, que j’ai entraînée là par miracle, usant et abusant de stratagèmes tordus depuis 2 mois pour préparer le terrain.

J’avais été chauffé à blanc par TF1 News, dont la critique énamourée avait effacé toutes les autres lues d’un oeil un peu snobinard-à-l’envers dans ma pensée (façon « Libé de toute façon ils boudent leur plaisir »).

La critique de TF1 News
La critique de TF1 News

C’est seulement lorsque j’ai vu TF1 Films en entame de générique que j’ai compris la potentielle supercherie. Parce que moi, lorsque c’est ma mère qui fait de la tarte aux épinards, je dis pas aux gens que c’est dégueu.

Yves Grosjean, t’es un vendu (faites passer) !

Bon, ne me restait en guise d’espoir que la critique de ce claivoyant internaute lue sur Allociné, disant tout haut tout ce que tout le monde pense tout bas. N’est-ce pas les frères DARDENNE ?

Capture d’écran 2016-06-30 à 09.32.52

La trame du film est la même que celle de toujours avec Patrick. Une saison aux Flots Bleus, et un invité surprise qui chamboule un peu le quotidien, mais pas trop quand même. Cette fois-ci, 3 invités, 3 djeunes qui parlent de « swag », de « kifer » et de « chanmé ». Le film n’est pas sous-titré, ce qui est un sacré pari étant donné la cible à laquelle il semble se destiner au regard de son souci de pertinence sociologique : un public tellement ieuv et déconnecté de toute réalité qu’il ne pointerait pas les aberrations que revêtent la méconnaissance des 2be3, de Demis Roussos, de Carlos ou encore d’Elton John par 100% des jeunes. Ah le conflit générationnel, ce réservoir inépuisable de vannes de vieux cons.

M’enfin, s’il ne s’agissait là que de faire passer les jeunes pour des blaireaux accros à leur portable et candidats de The Voice (si si, mais là je n’ai même pas compris scénaristiquement ce que ça apportait), je resterais client. Ça fait partie du plaisir de Camping, cette sensation par moment d’assister à un sketch de ton oncle complètement bourré à un mariage enchaînant les vannes limite, mais avec tout l’amour du monde dans les yeux.

Bon, le souci, si l’on reste un tantinet sérieux, c’est qu’outre cette bêtise dépeinte autour du portrait d’une jeunesse qui covoiture, co-couche et co-planque de la beuh dans du Benco, Camping 3 possède une bonne dose de racisme, d’homophobie et de blagues douteuses sur le handicap.

Mais c’est d’ailleurs paradoxalement sûrement le point le plus amusant du film. Onteniente a compris qu’il est un beauf, et qu’il doit quand-même faire un peu gaffe à ce qu’il dit maintenant qu’il a de moins en moins d’idées. Et à chacune de ses blagues racistes ou homophobes il répond illico par un « non mais j’rigole ». Le genre de type qui a priori, quand il s’emmerde en réunion avec un stylo et un feuille dessine des bites, puis les raye ou les transforme en visages. Par exemple, quand le personnage noir lance un « Comme mon père dit toujours, quand la banane est trop haute, faut lever le bras » avec une pause ensuite pour permettre au spectateur FN de se marrer, Patric Chirac lui répond « Ton père c’est Michel Leeb ? ».

Tout le film fonctionne par ce mécanisme de blagues front-nationalistes pas très drôles dégoupillées par des punchlines niveau Morano, « J’ai une amie noire ». L’homo refoulé un peu trop tactile mais qui a le droit d’être homo après tout, le vieux radoteur mais qui en fait fait semblant de radoter pour que les gens ne l’engueulent pas quand il fait mine d’avoir oublié de prendre l’apéro et se ressert un énième Pastis, l’handicapée qui marche sacrément bizarrement et à qui l’on peut coller des chewing-gum sur la jambe de bois sans qu’elle ne s’en rende compte (gène inégalable dans la salle pendant cette scène), mais qui finalement réussit à trouver l’amour…

Ce système de personnages caractérisés jusqu’à la caricature étouffe complètement le récit. Onteniente a oublié (ou ne s’en était-il jamais rendu compte) que ce qui faisait la force de Camping, c’était son faux rythme vacancier, sa radinerie de récit. C’était la confiance qu’il plaçait en Dubosc pour, en tongs et en marcel, porter le non-film sur ses épaules.

Ici, même son personnage est relou. Il est triste, seul, vieillissant : il cherche l’amour, sa fille et la tranquillité. Il est devenu un vieux con. Et c’est sûrement ça la chose la plus triste de Camping, l’impression de voir des vieux cons à l’écran, là où jadis on y rencontrait des beaufs sympas.

L’on est sortis du cinéma abattus. C’était normal et attendu pour l’une de nous deux, mais ce fut un sacré coup sur la tête pour ma part. Mais comme un signe du destin, il y avait sur mon chemin du retour une raison de tenir encore quelques mois, la promesse d’un nouveau grand rendez-vous de franche rigolade, qui ne pourrait être empêché, celui-ci : une affiche de Brice de Nice sous-titrée « bientôt de retour ». Je revis.

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