La Loi de la jungle : un film sans Kipling ni Vincent Lindon.

C’est toujours un peu effrayant d’aller voir une comédie française en ce moment. Heureusement, le nom d’Antonin Peretjatko rassure d’office. Le réalisateur qui s’est fait connaître avec La fille du 14 juillet fait partie de cette nouvelle génération de cinéastes qui semble vouloir redéfinir les codes du cinéma et ne pas se contenter des ficelles usées des centaines de fois. Le voici de retour avec La loi de la jungle qui n’est pas une adaptation de l’œuvre de Kipling avec Vincent Lindon.

Comme on l’espérait, le film de Peretjatko est très rafraîchissant, il n’hésite pas à aller au bout de ses idées. Et des idées, il y en a toutes les minutes du film. L’histoire absurde de ce stagiaire au « Ministère des Normes » qui doit vérifier la compatibilité d’un projet de station de ski en Guyane aux normes européennes est un prétexte pour enchaîner les gags, les situations absurdes et les répliques ciselées.

Le film tente donc beaucoup de choses et forcément tout ne réussit pas. Beaucoup de gags tombent à l’eau ou sont trop faciles (A force de critiquer les normes européennes, le Royaume-Uni va finir par quitter l’Union !). Mais au final, l’atmosphère générale du film, ses acteurs convaincants et son rythme soutenu font passer les quelques blagues ratées. D’ailleurs, il est fort à parier que chacun rira de moments différents du film, c’est le propre de ce genre de film. Personnellement, l’idée qui m’a le plus fait rire est la vision de Vincent Macaigne donnant des coups de machette dans un endroit de la jungle où rien ne fait obstacle à son passage. (Toi aussi, donne ton moment préféré du film dans les commentaires et je te dirai si tu es une personne drôle ou pas !). On retrouve dans ce film un style d’humour typiquement français qu’on n’avait pas vu depuis longtemps : une sorte d’« anarchisme de droite » à la Desproges. Mais on pense surtout à Jean Yanne qui utilisait de la même façon l’arme du recours à l’exagération pour critiquer les travers d’une société trop réglementée, trop cloisonnée, trop liberticides qui oublie et étouffe les petits plaisirs de la vie individuelle. Le film n’est d’ailleurs pas avare en références : assumées (Godard et la Nouvelle Vague sont invoqués dans de nombreux plans du film) et peut-être plus inconscientes (une scène de bagarre semble ainsi tout droit tirée d’Astérix).

Le film de Peretjatko s’inscrit donc dans une vieille tradition de la comédie française. Il y ajoute, cependant, une certaine modernité dans l’utilisation de l’absurde et l’actualisation des problèmes de notre société (le métier de stagiaire permanent en est l’exemple le plus frappant). La loi de la jungle ne plaira pas à tout le monde. Le film est inégal dans son humour et n’entrera pas dans le panthéon des comédies françaises (dont le maître incontesté est La Cité de la Peur, rappelons-le). Mais il a le mérite, ô combien salutaire et nécessaire, de tenter des choses et d’en réussir un certain nombre. Rien que pour cela, il vaut la peine d’être vu.

About The Author

3 thoughts on “La Loi de la jungle : un film sans Kipling ni Vincent Lindon.

  1. Le vigile de l’aéroport qui vérifie magnétiquement l’étiquette attachée à la poignée de la valise (manquante) de Macaigne:
    « Elle est là votre valise, monsieur. La machine ne se trompe jamais. »

  2. Les deux scènes de sexe, enfin surtout la deuxième. Drôle et assez émouvante. (mais vous êtes sur que c’est une comédie? y a pas grand chose de drôle dans ce film… :-/ )

  3. Mon moment préféré c’est soit le long passage où ils essaient de marcher à reculons dans la boue, soit le passage où Chataigne trouve Marianne dans la jungle et dit « La France ».

    Alors ?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.