La Stratégie Ender : les insectes ont le droit de vivre

La terre est menacée par une attaque des Doryphores, extraterrestres insectoïdes que l’espèce humaine est décidée à anéantir. Ender Wiggin, jeune garçon à l’intelligence exceptionnelle, est recruté par les autorités militaires pour intégrer l’École de la Guerre, où il sera formé parmi l’élite afin de mener une ultime bataille contre l’ennemi.

Drôle d’idée que cette adaptation du livre culte d’Orson Scott Card, célèbre auteur de science-fiction de confession mormone, près de trente ans après sa parution dans un contexte de guerre froide : des thèmes de science-fiction largement périmés, un acteur sur le déclin -mais apparemment toujours bankable -, une imagerie terne et vieillotte. La Stratégie Ender semble pourtant cartonner au box-office américain, preuve que le patriotisme guerrier fait toujours recette. Si on évite le nanar redouté grâce à un scénario plutôt solide (dont le mérite revient de fait à l’auteur du roman), difficile pour autant de s’enthousiasmer pour ce film désespérément terne et sérieux.

Gavin Hood nous livre pourtant quelques images fortes qui parviennent dans certaines scènes à distiller un sentiment de malaise insidieux. La vision de ces armées d’enfants en uniforme, tels des clones dressés pour tuer, évoque une imagerie fascisante restituée avec une âpreté dérangeante. Dommage que le manque d’ambiguïté des personnages (et en particulier des dirigeants militaires) réduise le propos à une vision manichéenne de la stratégie guerrière (la fin justifie-t-elle les moyens ? L’autre, s’il est différent, ne mérite-il pas d’être compris ?). Le film amplifie en ce sens les travers d’un roman d’une intelligence redoutable mais dont les penchants moralistes confinent à une austérité légèrement déprimante. En somme, on se situe aux antipodes d’un film comme Starship Troopers, dont les thématiques sont pourtant comparables : propagande militariste, déréalisation totale de la guerre. Mais Gavin Hood n’a pas le génie de Paul Verhoeven : le tout manque cruellement de second degré, de panache et de mise en scène, malgré quelques séquences de combat gravitationnel plutôt bien rendues.

En conclusion, la science-fiction mormone, c’est quand même un peu chiant. Et la prestation d’un Harrison Ford tout mou n’est pas là pour sauver cette adaptation dispensable.

La Stratégie Ender, Gavin Hood, avec Harrison Ford, Asa Butterfield, Ben Kingsley, États-Unis, 1h54.

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1 thought on “La Stratégie Ender : les insectes ont le droit de vivre

  1. En réalité vous êtes, je pense, passé à côté de la profondeur du sujet pour n’en voir que la façade (avec un petit jugement anti-mormons semble-t-il).
    Ce film parle de ce que signifie être un haut potentiel, de la fulgurance, de l’acuité, de la sur-efficience, et de l’hyper empathie. Il nous montre aussi comment les haut-potentiels peuvent être reconnus et exploités puis annihilés par les normo-pensants.
    Ainsi le protagoniste oscille entre son hyper-empathie représentée par sa soeur et un usage de sa supériorité pour détruire (l’autre facette, son frère). Il finit même par croire que son empathie peut servir un objectif de destruction, trompé par ceux qui l’exploitent. Mais il finit par vaincre, parcequ’il ne trahit pas son être intérieur, là où il aurait été facile de profiter d’une place de héro bien intégré.

    Le plus surprenant est donc qu’un blockbuster américain n’ait pas trahi ce propos tout en essayant d’offrir du spectacle pour tous.
    Je vais donc avec intérêt, découvrir les écrits de cet auteur

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