Dans le quartier le plus pauvre de Copenhague, le banditisme amateur semble une évidence, par nécessité même de survie. La sensibilité n’est de mise qu’à l’intérieur du cadre familial, qui reste la motivation essentielle des risques pris à l’extérieur. Le propos de Michael Noer est sans nouveauté, mais la particularité de ce thriller réside dans sa manière de décrire le déchirement intérieur d’une jeunesse en perdition qui n’imagine même pas d’autre « carrière » que celle que l’école du crime propose.
L’engrenage est assez classique, du cambriolage à la « larbinisation » auprès d’un caïd proxénète et dealer, pour déboucher sur le meurtre. Noer réalise un bel exploit cinématographique, caméra à l’épaule, avec des plans rapprochés qui font monter la tension en parallèle avec la mue de ce petit délinquant en criminel, qui prend conscience de sa descente aux enfers au moment même où celle-ci devient inéluctable.
Casper se justifie des risques grandissants qu’il prend par l’attachement et la tendresse qu’il voue à mère, son frère et sa petite sœur, qu’il rêve de sauver de leur condition de « maudits ». C’est ce grand écart impossible à tenir entre une sensibilité à fleur de peau et une vocation mal assumée de bandit qui le rend profondément attachant, nous mettant d’emblée du côté de ceux qui n’ont de vie qu’en-dehors de la loi. Le malaise produit n’a d’égal que le tragique de l’enfermement dans lequel se condamne ce criminel malgré lui.
Dans la veine du cinéma des frères Dardenne, la misère sociale nous est décrite comme la pire des morts, balayant l’idée de tout ce qui pourrait donner une valeur à la vie qui est misée pour en sortir.
Northwest, Michael Noer, avec Gustav Diekjaer Giese, Oscar Diekjaer Giese, Roland Moller, Danemark, 1h31.