Ginger et Rosa : le joli minois d’Elle Fanning dans un drame anecdotique

Révélé il y a deux ans, lors des sorties successives de Somewhere de Sofia Coppola et Super 8 de J. J. Abrams, le minois juvénile d’Elle Fanning, petite sœur d’une Dakota déjà grande, ne manqua pas de trouver rapidement ses fans. Séduction d’une préadolescence encore dansante, pas trop ténébreuse, faisant de la jeune fille l’inverse d’une Lolita : un elfe blond dont le moindre sourire, le moindre geste suffisait à ensoleiller même provisoirement les récits les plus lourds, parfois même les plus tragiques (Twixt de Coppola père, où elle incarne un fantôme).

Avec Ginger et Rosa, Sally Potter offre à l’actrice de seulement quinze ans son premier rôle d’adolescente torturée, voire de jeune adulte, en même temps que son premier premier rôle tout court. Disons-le sans détour : ce n’est pas sans une certaine tristesse que l’on confesse être pour la première fois resté de marbre devant ce qui n’est rien d’autre qu’une banale performance d’actrice, là où ce qui faisait le prix d’Elle Fanning résidait dans la conformité de son jeu à son état réel, celui d’une gamine pur jus. Dans ce dernier film, elle incarne donc Ginger, fille unique d’une famille en pleine tempête, partagée entre son admiration pour son père prof de philo et son affection embarrassée pour sa mère dépressive. S’ajoute à son malheur la liaison de sa meilleure amie, Rosa, avec Papa…

Le film est non seulement très plan plan, en termes de mise en scène, de structure, mais aussi incroyablement lourd dans sa manière de surligner par le jeu hystérique des acteurs ce qu’une trame scénaristique cousue de fil blanc nous fait pourtant très bien lire : quel avenir pour une jeunesse sans repères à l’aube de la Guerre froide ? quelle femme peut devenir une fille dont les parents ne mesurent pas l’impact de leurs choix de vie égoïstes ? etc. Cela pourrait être émouvant si la pauvre Elle Fanning, pleurant plus que de raison, ne voyait pas dans la dernière ligne droite tous les enjeux psychodramatiques de cette histoire peser sur ses épaules encore trop frêles.

La dimension anecdotique du film nous interdisant toute cruauté, contentons-nous alors d’attendre la suite des aventures de notre teen préférée en croisant les doigts pour que les retours délirants sur cette performance ne sonnent pas encore le glas de ce qui, mine de rien, ressemblait peu ou prou à un âge d’or : celui d’une grâce semblant encore s’ignorer et gagnant par-là même à se consolider step by step, sans projet de maturation précoce. Tout reste possible.

Ginger et Rosa, de Sally Potter, avec Elle Fanning, Alice Englert, Christina Hendricks, Grande-Bretagne, 1h30.

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