Camille Redouble

Si j’avais quarante ans et que je pouvais revenir vingt-quatre ans en arrière, est-ce que je ressortirais avec celui qui m’a brisé le coeur ? Serais-je plus présente avec ma mère pour retarder sa mort ? Est-ce que je m’empêcherais d’aimer pour ne plus souffrir ? Est-ce que je m’empêcherais de souffrir pour ne plus aimer : ne plus vivre ? 

Camille redouble est un élément de réponse à ces questions que vous vous posez sûrement si vous êtes, comme moi, une fille de 16 ans dans un corps de…16 ans. 

Camille, 40 ans, est une alcoolique notoire. Normal, son mari depuis 25 ans la quitte pour une jeune-fille. Après une soirée bien arrosée du jour de l’an, la voilà qui replonge dans sa vie d’adolescente, quand elle avait 16 ans. Décidera-t-elle de revivre tête baissée son amour avorté ?

Le génie de Noémie Lvosky est de camper le personnage de Camille, qu’elle ait 16 ans ou 40 anssans se changer physiquement. Et que moi, spectatrice, je trouve ça tout à fait convaincant.

Camille retrouve ses amies d’avant (restées les mêmes 25 ans après – moi qui ne garde jamais plus de deux ans mes amis facebook, ça m’a fait un coup), ses cours de théâtre et Eric (le génial Samir Guesmi), celui qui l’a quittée. Il lui fait la cour et elle lui récite l’histoire de leur vie future : il la prend pour une folle. Son ami Vincent (Vincent Lacoste, découvert comme fils de Noémie Lvosky dans le cultissime Les beaux gosses) la définit comme la Mathilde de la Molle du Rouge et le Noir : « une chieuse ». Chieuse + folle = Eric tombe amoureux d’elle, pas de bol.

Alphonse (Denis Podalydès) est le prof de sciences de Camille, et le seul « élément » qu’elle découvre dans son passé, figure emblématique proche du Doc de Retour vers le futur. Elle va s’accrocher à lui, comme à un empêcheur de tourner en rond, une déviation, une bouée de secours d’Eric, son grand amour.

Noémie Lvosky, comme moi, est nostalgique de la croyance religieuse aux mots d’amour d’Eric :

« On est comme deux planètes qui s’attirent, on n’y peut rien. »

Jean Pierre Léaud campe l’horloger, sorte de Merlin l’enchanteur psychédélique. À la demande de Camille, il scie l’alliance qui l’unissait à Eric après sa séparation et grâce à lui, ce dialogue qui résume l’idée du film quand Camille veut faire scier sa bague une 2ème fois, lors de son voyage dans le passé :

« Pour ôter cette bague, il faut du savon et de la patience.
– Mais, j’ai utilisé du savon.
– Vous avez oublié la patience. »

Comme moi, Camille pense que la patience, c’est une marque de fleur, d’épices voire de chien.

Ma dissertation a une conclusion : Tout a une fin, rien n’existe sauf le bonheur qu’on décide pour soi-même.

Cette morale est un brin catholique, n’est-ce pas ? En voici alors la version scientifique : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. »

Et celle d’Arnaud Fleurent-Didier, qui est mienne : « Je ne m’habitue pas aux choses qui finissent / Depuis tout petit, c’est un peu mon vice.« 

Quand je serai grande, je tuerai le chanteur narcissique et bobo qui est en moi pour devenir une scientifique catholique.

Camille redouble est un film pour les filles de 1979 alcooliques, tendres, romantiques et amoureusement suicidaires.

Et pour les garçons qui aiment ces filles là.

Je vous laisse, j’ai psy.

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